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Dans le cimetière de Chamonix 2 tombes avec des skis
Dans le cimetière nombreuses sont les tombes avec piolet , cordes rappelant l’alpinisme , activité emblématique de Chamonix. Et, bien que le ski fasse partie de la culture chamoniarde, seules deux tombes sont ornées d’une paire de skis. Ces skis recouvrent entièrement les 2 pierres tombales. Pas d’autres accessoires, afin de rappeler à tous l’importance que ces skis ont pu jouer dans la vie de ces deux « chamoniards » enterrés ici.
Elles sont donc uniques.
Ces deux tombes rappellent un moment de l’histoire du ski de la vallée.
Ici on retrouve le Docteur Hallberg et le beau « Muck » personnage illustre de la vallée.L’un est allemand, l’autre polonais.
En 1929 tous deux écriront en français et en commun un ouvrage intitulé « le ski par la technique moderne » qui ferra le buzz lors de son édition.
Le docteur Hallberg, passionné de ski, apporte sa connaissance médicale et son regard habitué des sportifs, Muck , exceptionnel skieur, apporte sa connaissance de la montagne ,du ski en tous genre puisqu’il pratiquait aussi bien le ski que le ski de fond et le ski de saut.
Ce livre sera réédité trois fois en français et une fois en italien avec les corrections apportées en raison de l’évolution rapide des techniques et de la pratique du ski.
Cet ouvrage illustré de plus de 200 dessins est novateur en France. Les auteurs s’arrêtent sur l’importance de l’équipement , du choix des skis, des farts, des bâtons, des fixations, de l’entraînement.
Puis ils abordent les différentes techniques de l’époque : christiania, télémark, lifted stem, ski de saut, ski en haute et moyenne montagne, ski de descente et de slalom.
Mais on y découvre aussi un très grand chapitre sur les régimes alimentaires, sur
l’hygiène du sportif, sur l’importance de la préparation physique et mentale et également toute une médecine sportive qui est totalement novatrice dans ces années d’entre deux guerres.
Cette partie est incroyablement moderne et d’actualité !
Le succès de cet ouvrage vient de la clarté des explications, des dessins précis et très évocateurs. D’autant qu’à cette époque les écoles des diverses techniques se querellaient bien souvent.
le docteur Hallberg écrira un autre livre en 1936 juste avant la domination de la méthode décrite par Emile Allais qui deviendra la technique adopté par toutes les écoles de ski de France .
Ces deux personnages, un peu oubliés, laissent donc à Chamonix leur empreinte sur l’évolution technique du ski. Leurs deux tombes nous le rappellent.
Histoire et patrimoine de la vallée de Chamonix
Christine Boymond Lasserre
La première représentation picturale du massif du mont Blanc
Voici un tableau étonnant. Il date de 1444 et a été réalisé par le peintre souabe Conrad Witz. Commandé par l’évêque de Genève pour la cathédrale Saint Pierre, il représente comme il se doit une scène religieuse. Celle-ci intitulée « la pêche miraculeuse » est peinte au bord du lac Léman.
Effectivement, la scène se passe sur la rade du lac. On y voit le Christ, les pêcheurs avec leur filet sur la barque et Saint Pierre patron de la cathédrale de Genève nageant vers Jésus. On comprend évidemment toute la symbolique religieuse de ce tableau.
Mais ce qui est tout à fait exceptionnel pour l’époque c’est l’arrière-plan. Un paysage topographique précis. Bien peu de tableaux, en cette période de fin du gothique début Renaissance, laissent une place aussi importante aux sites naturels environnants.
Certes, au 15ème siècle, de nombreux tableaux ont pour décor un paysage. Mais celui-ci n’est jamais identifiable. Il est virtuel, imaginaire, il sert de décor, ou alimente une métaphore ou une symbolique comme dans certains tableaux de peintres flamands ou même de Léonard de Vinci.
Ici ce n’est pas le cas. Le décor est exact, conforme à la réalité.
On remarque très bien, sur la droite, la ville de Genève dont certaines maisons reposent sur des pilotis, le château de l’Ile (de nos jours au centre de la ville). A l’arrière les murs d’enceinte et des petits personnages brandissant le drapeau de la maison de Savoie.
On admirera surtout les détails du paysage sur le fond de cette scène. On y voit distinctement le Môle au centre, le Salève à droite, les Voirons à gauche et tout au fond le Massif du Mont Blanc, le massif Ruan – Buet – Tenneverge, et à droite celui des Bornes – Aravis.
C’est la première représentation connue de l’ensemble des ces montagnes.
Il faudra attendre plus de trois siècles avant que le Mont Blanc ne fasse son apparition dans la peinture.
Ce tableau a été restauré en 2013. Il fait partie d’un ensemble de 4 panneaux visibles au musée d’art et d’histoire de Genève. A voir absolument.
Histoire et patrimoine Chamonix – Christine Boymond Lasserre
Sources :
Musée Art et Histoire de Genève .
Ouvrage : le Mont Blanc vu par les peintres (Editions du Belvédère)
Auteurs : Jacques Perret et Loïc Lucas
Comment dans les temps anciens voyageait- on pour arriver à Chamonix ?
FILM DES FRÈRES LUMIÈRE A VOIR EN FIN D’ARTICLE
L’accès à Chamonix fut toujours difficile.
Au XIXème siècle, si l’on arrivait relativement facilement à Sallanches en diligence , accéder à la vallée était bien souvent une aventure. En raison du chemin accidenté, traversant nants et torrents, nul véhicule ne pouvait impunément rouler sur ces chemins trop raides, trop périlleux.

Tableau Eugène Guérard. « La malle poste de Sallanches à Chamonix » 1850 -Copyright RMN (Réunion des musées nationaux)
Le moyen le plus courant était bien sûr le mulet ou la marche à pied. Mais parfois les touristes empruntaient un attelage des plus rudimentaires : le char à bancs, sorte de voiture hippomobile ouverte, à quatre roues, munis de bancs disposés parallèlement aux essieux…pas vraiment confortables ! Et lorsque la pente était trop raide ou trop glissante le voyageur était prié de descendre du véhicule. On démontait le char que l’on remontait ensuite quelques centaines de mètres plus loin.
Lors de son voyage vers les glacières de Chamonix l’empereur Napoléon III, effrayé par cet itinéraire éprouvant, offrit une somme d’argent pour la construction d’une route carrossable plus large, plus grande et moins dangereuse.
Ce qui fut fait. La route arriva définitivement à Chamonix en 1870.
A partir de cette date, très rapidement, les diligences arrivèrent directement de Genève à Chamonix. Tout d’abord une par semaine, puis une par jour voire deux ou plus. Elles quittaient Genève à 8h du matin et arrivaient à Chamonix vers 16h.
Il existait plusieurs modèles de diligences, plus ou moins grandes en fonction du nombre de voyageurs.
D’une manière générale, les voitures étaient divisées en 3 compartiments comportant à l’avant un siège couvert appelé « coupé » comprenant trois sièges plus celui du cocher, au centre à l’intérieur une partie appelée « berline » pouvant contenir 6 ou 8 personnes, , parfois une autre berline située au dessous de cette première, à l’arrière un siège appelé « rotonde » pour 3 personnes (mais peu apprécié des voyageurs). Parfois sur le toit se trouvait une banquette appelée impériale.
Les tarifs évidement étaient variables en fonction de l’emplacement du siège dans le véhicule.
Les bagages souvent encombrants se trouvaient soit en haut, soit dans des coffres à l’avant ou à l’arrière du véhicule.
Pour accéder à l’intérieur de la diligence on avait besoin d’une échelle. Il existait parfois des marchepieds portefeuilles.
La partie intérieure de la berline était recherchée car plus confortable… Mais plus chère aussi. Elle était habituellement agrémentée de larges banquettes ou coussins rembourrés de crin animal ou végétal. Il existait aussi un coussin particulier de forme allongée et très souple appelé rouleau de voyage qui servait à caler les épaules et le cou… On imagine bien volontiers les secousses. On devait arriver exténués !
A l’arrivée à Chamonix tous les grooms des hôtels attendaient les voyageurs de pied ferme ! Leur harcèlement était souvent excessif!
L’arrivée du train à Saint Gervais accéléra l’arrivée des touristes dans la vallée et parfois l’on pouvait avoir quatre, cinq diligences arrivant directement de ce terminus.
Dès que le train arriva à Chamonix en 1901 les diligences cessèrent rapidement leurs voyages. Et on allait entrer dans une autre période, celle des automobiles à moteur.
Copyright Christine Boymond Lasserre
Histoire et patrimoine de la vallée de Chamonix
L’évolution de Chamonix entre 1864 e 1930 : intéressant
Il est intéressant de regarder l’évolution du développement de Chamonix. Après l’incendie de 1855 une grande partie de la ville disparut dans les flammes (rue Vallot actuelle). Il fallut beaucoup de temps à l’administration locale et préfectorale pour engager une reconstruction que le préfet voulait « donner à cette perle précieuse de la France pittoresque ».
C’est seulement en 1864 que l’on voit la première politique d’alignement appliquée à la rue principale. Ceci grâce à la « générosité initiative du gouvernement qui par les subventions qu’il a accordé a permis à la commune de donner un tout nouveau aspect à Chamonix à la plus grande satisfaction des étrangers et des gens du pays… »
Ci dessous diverses photos permettant de voir l’évolution de la ville entre 1864 et 1930
Grotte naturelle ou grotte artificielle au glacier des Bois ?

Aquarelle de Samuel Birmann . Collection Payot « La mer de glace et le villages des Pratz en août 1823 »
Dès la fin du 18ème siècle, les premiers visiteurs venus à Chamonix avaient pour habitude d’aller découvrir la grotte naturelle formée au niveau de la langue terminale du glacier des Bois et par laquelle jaillissait la source de l’Arveyron.
Le site était particulièrement impressionnant en raison du vacarme provoqué par l’eau qui s’en échappait.
Mr Martel venu en 1742 ( qui donna le premier le nom de « Mont Blanc » à ces monts affreux) découvre cette grotte dont parlent ses guides, elle a alors 26 mètres de haut.
Plus tard, le genevois Marc Théodore Bourrit, lors de ses nombreux voyages à Chamonix (entre 1760 et 1790), aimait beaucoup emmener des visiteurs à la découverte de ce lieu « magique ».
…Que vous dirai-je des sources de l’Arveyron ? Rien, assurément qui puisse vous donner l’idée de cette merveille… Imaginez un portique immense en forme de cintre, l’Arveyron sortant en bouillonnant au fond de cette voûte de glace que le soleil embellissait de toutes les couleurs de l’arc en ciel. Des quartiers de rochers, des masses énormes de glaces détachées, environnant cette redoutable enceinte et semblant en défendre l’entrée. Nous pénétrâmes à travers ces débris mais l’Arveyron empêche que l’on puisse pénétrer plus savant. Nous en vîmes assez pour juger de l’enfoncement prodigieux de la voûte et de la beauté de la glace….Cette voûte tombe, s’écroule, en éclats, chaque année et se ferme, puis reparaît à la fonte des neiges… »
Horace Bénédicte de Saussure, ce naturaliste genevois qui fit la 3ème ascension du Mont Blanc, en parle comme une excursion facile. Par lui on apprend que l’on met une heure pour s’y rendre mais il précise qu’il peut y a voir un certain danger, souvent des blocs de glace s’effondrent…
En 1800 elle mesure 32m de haut. En 1816 elle reçoit la visite des poètes romantiques qu’étaient Byron et Shelley.
La langue glacière à cette époque arrivait au niveau du pas de tir récemment aménagé.
Cependant, en Suisse, à Grindelwald, sur le glacier inférieur, une grotte artificielle est réalisée dès 1861. Cette idée germa à Chamonix. Un «étranger » propose d’en creuser une au glacier des Bois. L’autorisation lui fut refusée par la mairie mais une année plus tard une concession est donnée aux guides Jean Marie et Michel Couttet. Le projet aboutit durant l’été 1863. On creuse une galerie de 26 m qui conduit à une rotonde. A côté existait une crèmerie appelée « Au Touriste ».
Ce fut la première grotte artificielle de Chamonix.
Photos de la grotte à découvrir dans l’ouvrage de Rémi Fontaine « Chamonix et ses glaciers. les premières images ».Page 122 et 123
En 1868, Théophile Gauthier passe quelques jours à Chamonix. Dans son livre Vacances du Lundi il écrit :
..On arrive en serpentant à travers des blocs de rochers en désordre, de flaques d’eau sur lesquelles sont posées des planches …Un guide qui se tient dans un petit chalet décoré de photographies, nous mena voir, un peu malgré nous, la curiosité qu’il exploite. On paye cinquante centimes par personne. Ce n’est pas cher sans doute mais cela vous détourne de votre but. C’est une sorte de cave d’azur, un trou dans le flanc du glacier, que nous soupçonnons fort d’avoir été élargi et régularisé de main d’homme. A l‘entrée le jour pénétrant l’arcade de glace produit un effet assez magique. On avance suivant dans la boue une planche étroite et protégé par un parapluie de coton contre les gouttelettes qui tombent de la voûte avec un tintement sonore. Quelques chandelles grésillantes, placées de loin en loin, jouent de leur les feux de Bengale et tâchent inutilement de donner à cette caverne humide un aspect féerique. On revient sur ses pas et l’on se trouve avec plaisir hors de cette atmosphère moite et glaciale.
Le tour est fait et vous êtes libre d’aller admirer à quelques pas la grande arche de cristal par laquelle l’Arveyron sort en bouillonnant du glacier impatient de se produire à la lumière après avoir si longtemps cheminé …
1867 voit le renouvellement du bail .
En 1869 Venance Payot évoque une galerie de 100 mètres de long difficile à réaliser. Ensuite il n’y aura plus de grotte artificielle .La grotte naturelle disparaîtra elle aussi…