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Mois : mars 2020

Mais qu’y avait-il donc à l’emplacement du Super U ?

L’été dernier, sa rénovation lui a redonné de la couleur. Mais avant d’être un super-marché, qu’était donc ce bâtiment ?

En regardant les anciennes photos, vous découvrirez que cet immeuble a abrité, d’une part un hôtel : l’hôtel de la Paix, et d’autre part une pâtisserie : la fameuse « PDA » (la Pâtisserie Des Alpes) .

Hôtel de la Paix

Construit  probablement vers 1870 par une famille Claret Tournier, l’hôtel connaîtra nombre de propriétaires différents, dont Mr Bourgeois en 1895 et 1896, Mme Eloi Couttet en 1912, Mr Gustave Tairraz en 1924, Mr Alfred Tairraz en 1925, et Alfred Couttet (guide) en 1940. Il sera ensuite géré par des consorts qui, fin 1944, vendent l’hôtel à Romain Payot.

On sait que durant la seconde guerre mondiale l’hôtel a abrité nombre des jeunes enfants juifs.

PDA Pâtisserie Des Alpes

Beaucoup, parmi les anciens, se souviennent encore de la fameuse pâtisserie « PDA » . Jean Edouard Devouassoud créa d ‘abord dans les années 1870 une  boulangerie qui connut  un réel succès. Après la première guerre mondiale, la boulangerie est abandonnée au profit de la pâtisserie et ce sont Hélène et Jeanne Vallet (nièces de Mr Devouassoud)  qui tiennent cette « PDA ». C’est d’ailleurs Jeanne qui épousera René Payot associé de son  frère Paul Payot banquier. Il sera le père d’ un autre Paul Payot ( le fameux historien) avant de décéder durant la guerre de 14-18.

Les deux femmes tiennent d’une main de fer la boutique et leur pâtissier, le célèbre François Aubert,  fabrique durant 40 ans les meilleurs macarons qui soient . Il les expédie dans le monde entier. A la lecture des journaux et des publicités la « PDA » est toujours référencée comme étant la meilleure pâtisserie de Chamonix. Dans les années 50, la pâtisserie change de main, mais  la tradition se perpétue..On fait même jusqu’à 56 sortes de chocolats différents !

La pâtisserie ferme en 1961, vendue à Romain Payot qui avait quelques années auparavant acheté l’ancien hôtel de la Paix.

Sources :  Archives famille Payot Pertin – Archives association des Amis du Vieux Chamonix – Revue Relief – Livre : Flâneries au pied du Mt Blanc de Ch Boymond Lasserre et Joëlle Dartigue Paccalet

A Chamonix en 1898, l’air conditionné avant l’heure ?

Dès le XVIIIe siècle Chamonix est fréquenté par des  scientifiques à l’époque appelés « naturalistes ». Les premières ascensions vers le Mt Blanc seront, avant tout, réalisées par des hommes désireux d’en connaître la formation géologique, ou de comprendre les questionnements liés à l’altitude, sans parler évidemment de l’intérêt pour les formations glaciaires,etc…

La période de la Belle Époque, avec sa révolution scientifique et technique en Europe, verra un accroissement de fréquentation encore plus important des scientifiques en tous genres. On connaît les plus connus,  Pasteur et ses recherches bactériologiques, Janssen et ses études sur l’astronomie, Vallot et sa curiosité pour les glaciers. A la lecture des revues spécialisées de l’époque, on découvre l’incroyable attrait de la vallée pour des scientifiques de tous bords. Nombre de rassemblements y sont organisés régulièrement   qui les attirent  fréquemment. C’est ainsi que Viollet le Duc, découvrant ce lieu magnifique, imaginera la maison idéale à construire dans ces montagnes au climat rude. Article à consulter sur l’article  ci joint.Viollet le Duc à Chamonix. Qui s’en souvient ?

Dans un numéro de la revue « Nature » de 1898, un petit article éveille l’attention. « Nature » est l’une des revues scientifiques les plus anciennes et les plus réputées au monde de l’époque. Elle a été lancée en 1869 avec une vocation d’excellence dans les domaines des sciences et la liste des articles en tous genres est impressionnante.

Parmi ceux-ci, une publication de Max de Nansoutty, ingénieur civil des Arts et Manufactures, évoque la construction  à Chamonix d’une maison bien particulière réalisée par Monsieur Caron, architecte, ancien élève de l’École Centrale. Mr Caron, montagnard,  réside dans la vallée. Il prend conscience de la particularité de ce climat glacial en hiver et chaud en été. Il imagine une maison à température constante c’est-à-dire insensible aux variations thermiques. S’inspirant des chaudières tubulaires adaptées aux locomotives à vapeur, il conçoit une maison avec des murs de bois à double paroi. Entre les deux murs, une charpente tubulaire à circulation d’eau permettrait de donner à l’air de l’espace sa température optimale En été on ferait circuler de l’eau froide qui rafraîchirait les murs et en hiver  l’eau passant tout d’abord dans un serpentin de calorifère pourrait être envoyée chaude dans ces tubulures réchauffant l’ensemble de la maison ! L’idée est séduisante !

Un peu comme un radiateur géant les murs seront donc toujours à la bonne température.

La maison est rapidement construite. Le montage de cette charpente creuse se fait sans l’aide d’un ouvrier spécialisé.  Tous les planchers, tous les plafonds et tous les murs communiquent entre eux ; les murs sont en bois, formés de planches clouées sur des madriers liés aux tubes par des colliers métalliques. Commencée le 7 juillet 1898, elle est habitable le 15 septembre.

L’article s’arrête là, mais qu’est donc devenue cette maison ? C’est dans une autre revue de 1902 , « La science curieuse et amusante », que l’on apprend, hélas, que l’hiver suivant, très froid, l’eau s’était congelée à l’intérieur des tuyaux et le calorifère en surchauffe, mit le feu aux murs, détruisant l’ensemble de la maison. Ce fut donc un essai pour rien !

Une vingtaine plus tard l’architecte Marcel Cochet réalise en 1930, à Chamonix, un bâtiment (Banque Payot) qui sera citée par l’école d’architecture de l’époque comme un exemple remarquable de bâtiment conçu pour lutter contre le froid et le chaud  Article ci joint : Une remarquable expression de l’art déco : la Banque de Paul Payot maire de Chamonix de 1888 à 1901

Bibliographie : Revues scientifiques : « Nature », « La science curieuse et amusante » , revues « Architecture moderne « .

Une « sportswoman » oubliée de Chamonix : Marie Marvingt

«  Il n’y a pas une femme au monde qui possède un bagage sportif aussi universel que Mlle  Marie Marvingt et je ne voudrais pas garantir qu’il existe un seul représentant du sexe mâle qui en ait un semblable ». Voilà en quelques mots un article de la revue aérienne du 25 décembre 1910 qui parle avec autant d’admiration d’une femme d’exception.

Pionnière de l’aviation, championne de ski, nageuse virtuose, aventurière, héroïne de guerre, tels sont les qualificatifs donnés à Marie Marvingt dans les diverses publications de la Belle Epoque lorsque peu à peu les femmes soutiennent des paris sportifs incroyables.

1899, elle obtient l’équivalent du permis de conduire. 1904, elle participe à la première  course cycliste Nancy Bordeaux. 1906, 1ère française à effectuer les 12kms de la traversée de Paris à la nage. 1908, elle termine le tour complet du Tour de France, malgré le refus de l’administration de sa participation à la course. Elle le fera  jour après jour, avec quelques heures de décalage,  dans la foulée de la vraie course.1909, première femme à traverser la Manche en ballon. 1910,Brevet de pilote. 900 vols en avion avant la première guerre mondiale. Puis elle se fera remarquer par son implication et sa participation en tant que pilote durant la guerre, où elle invente le concept d’aviation sanitaire !

ET A CHAMONIX ?

Elle est proche de la famille Vallot, amie de Madeleine Namur, fille de Joseph Vallot, avec qui elle invente des tenues adaptées pour le ski, le patin à glace et l’alpinisme.

Elle loge dès 1903 à l’hôtel Couttet, car très proche des deux frères Joseph et Jules avec qui elle s’initie au ski avec l’aide de deux  moniteurs norvégiens : Durban Hansen et Nyqwist !

En 1903, elle découvre l’escalade avec Camille Ravanel à l’aiguille de l’M.

1905, elle est la première femme à faire la traversée Grands Charmoz- Grépon avec Edouard et G. Payot, guides chamoniards. Elle échappe de peu à une avalanche de rochers dans le couloir Mummery !

1907, le 5 août avec Joseph Démarchi et Jacques Tissay, elle fait l’aiguille du Moine. Puis le 8 août la traversée col du Passon et col du Tour Noir. Le 9 août le Chardonnet et le 13 août  la dent du Requin !

Quelle santé cette femme ! On la voit à la Dent du Géant où elle prononce ces mots : «  j’ai le mal des hauteurs et n’en veux plus guérir », se fait remarquer en Suisse au Mont Rose, à la Jungfrau, au Wetterhorn …

1908, première ascension féminine du Buet à ski.

1909, troisième à la course féminine de ski mise en place dans la vallée.

1909, première féminine  au col de Balme à skis.

1909, première en luge à Gérardmer.

1910, première en patinage au Ballon d’Alsace.

1910,première femme au Col de Voza à skis.

1910, première au championnat féminin international de bobsleigh ! Première au concours de saut  à Chamonix!

1912, première à la compétition de luge organisée à Chamonix

1924, elle survole en hiver avec Mr Thoret l’ensemble du massif du Mont Blanc, un grand bonheur pour elle. Très amie avec Jean Lavaivre, maire de Chamonix, ils mettent en place les journées de l’aviation qui connaissent beaucoup de succès.

Puis, dans les années 1930, elle invente un ski métallique pour se déplacer sur le sable et parcourt le sud tunisien et le sud Marocain avec ses skis. Elle explore tout le Maghreb avec son avion…  et ses skis.

Ses conférences attirent un grand nombre d’étonnés et de curieux. Elle est prolixe, vivante, amusante.

A l’âge de 85 ans elle passe son diplôme de pilote d’hélicoptère.

Elle décède deux ans après dans un certain dénuement ! Mais dans son pays d’origine, la Lorraine, elle sera honorée par  nombre de places, écoles et terrains d’aviation à son nom.

A Chamonix ? Rien !

Sources : Revues « la vie au grand air », Revue universelle et populaire illustrée, « Aviation Magazine, « Femina », « Revue aérienne », « la montagne », Archives Vallot de l’association des Amis du Vieux Chamonix

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