Auteur/autrice : Christine BOYMOND LASSERRE

Guide conférencière. Pratique ma profession depuis maintenant plus de 40 ans. Ai acquis une longue expérience et de larges connaissances en terme d'histoire de patrimoine et d'architecture. Toujours passionnée par ces thèmes et ces sujets !

1886 à Chamonix un voyage de noce pas banal !

Ah l’amour quand ça vous tient !


Fritz Schuler, né à Bonnneville, 1er guide étranger, entre à la compagnie des guides en juin 1882 .

Guide compétent, il emmène très vite ses clients au mont Blanc. La liste des ses courses est impressionnante.

Pour en savoir plus sur Fritz Schuler : cliquer ci dessous

https://dev.blogdechristineachamonix.fr/wp-admin/post.php?post=5438&action=edit

Il tombe amoureux d’une belle jeune fille nommée Jeanne Rauschert, originaire de Morges en Suisse. Après un mariage laïc au printemps, ils se marient religieusement en septembre 1886. Les deux tourtereaux, dès la cérémonie terminée, abandonnent rapidement les festivités et se précipitent sur les pentes conduisant au refuge des Grands Mulets accompagnés de quelques amis séduits par cette idée originale. Ils franchissent torrents et crevasses et passent leur nuit de noce aux Grands Mulets ! o

Décision déjà pas banale pour l‘époque ! Mais qu’à cela ne tienne, le lendemain, notre fougueux Fritz, encouragé par ses amis fascinés par un beau temps parfait et une journée s’annonçant splendide, convainc sa belle et son petit groupe de partir vers ce sommet encore mythique pour l’époque. Qu’a -t-elle pu répondre à cette proposition ? Quels ont été ses sentiments, ses impressions ? Car on imagine facilement notre Jeanne encombrée de sa longue robe et portant des chaussures sans doute pas très adaptées. Mais elle part à l’aventure confiante dans la décision de son Fritz. La seconde étape sera le refuge Vallot , où tous deux passent leur seconde nuit ! Le lendemain, ils font l’ascension du mont Blanc et au retour s’arrêtent de nouveau au refuge Vallot … Là Ils sont seuls et tranquilles , ce sera leur troisième nuit ! L’altitude ne semble pas leur avoir posé de problèmes ! Finalement, le quatrième jour, ils décident de redescendre et après une pause aux Grands Mulets, les deux amoureux rejoignent Chamonix en fin de journée ! Ils sont accueillis par une foule enthousiaste impressionnée par l’exploit de cette jeune femme qui n’avait jamais vraiment grimpé en haute montagne. Certes, quelques femmes avaient cherché à atteindre le sommet du mont Blanc, mais c’étaient bien souvent des touristes. Rarement, les femmes de guides ou tout simplement les habitantes du village n’auraient osé y penser. Mais Jeanne resta toujours très modeste sur cette ascension du mont Blanc en 1886.
Bravo à Jeanne ! qui par la suite donna quatre enfants à Fritz. Mais hélas, elle perdit son guide de mari en 1904 des suites dramatiques d’une chute en crevasse !

Source : Livre de Charles Schuler, l’histoire d’une vie peu ordinaire.

MARIE des Grands Mulets

: Une illustre inconnue au destin un peu particulier.

 Lors de diverses lectures concernant l’ascension vers le mont Blanc au cours du XIXème siècle on fait quelquefois allusion à la cuisinière la plus élevée de l’Europe « Marie des Grands Mulets ». L’auteur d’un de ces voyages  évoque Marie qui   leur raconte des histoires d’accidents, de tempêtes, d’ouragans d’avalanches …. Pendant les mauvais temps Marie reste parfois 8 à 10 jours sans voir personne. Et n’est  point sans émotion au souvenir d’une  terrible nuit qu’elle passa sous un rocher des Grands lorsqu’un  ouragan d’une violence inouï, avait soulevé l’ancienne cabane à un pied au dessus du sol menaçant d’emporter la fragile maison à travers les séracs des glaciers ..Mais Marie reste fidèle à son poste possède une petite bibliothèque !

Plus tard  La fille de Joseph Vallot parle tendrement de Marie qu’elle admirait particulièrement. « Je dois noter l’énergie de cette brave paysanne  qui à 3300 mètres d’altitude et qui durant près de 20 ans  fut la bonne hôtesse qui faisait la liaison entre la vallée de Chamonix et le mont Blanc. Elle ne semblait cependant pas destiner  à vivre dans les glaces ayant passée sa jeunesse dans  la loge d’une danseuse d’opéra dont elle était la femme de chambre et qu’elle quitta pour épouser un machiniste  du centre du Théâtre National qui par la suite la ramena chez lui… Elle en avait vu la bonne Marie qui  parfois seule comme dans un phare demeurait isolée par les jours de tourmente  dans sa petite cabane … »

Après quelques recherches   (grâce à la généalogie des Amis du Vieux Chamonix) on trouve que cette Marie était une jeune femme originaire de Pyrénées (son nom Marie Lacabanne) qui  partit travailler à Paris  puis épousa Basile Tairraz  originaire de Chamonix , cultivateur et guide en 1852 et commissionnaire à paris. C’est ainsi qu’elle arrive à Chamonix. Elle eut avec Basile un garçon nommé Paul qui à l’âge de 9 ans alla voir sa maman et en profita pour faire le mont Blanc le 13 juillet 1877.

Marie restera 20 ans chaque été assurant les repas et l’entretien du refuge

Mais qui de nos jours qui se souvient de Marie, de sa bonne cuisine, de sa bonne humeur et de son attention auprès des clients ?

20 ans au refuge des Grands Mulets c’est une sacré performance.

De l’usage des bains dans l’hôtellerie chamoniarde

Au cours du XIXème siècle la vallée de Chamonix voit  le nombre de visiteurs croître de jour en jour. On compte 10 hôtels en 1860 lorsque  la Savoie devient française et dès lors Chamonix se développe rapidement. Les chamoniards édifient auberges, petits hôtels familiaux, hôtels de grand confort puis hôtels de luxe.

Un hôtel dit « confortable », au début  du XIXème siècle,  se devait de proposer à ses clients dans chaque chambre un « meuble  de toilette » recouvert d’une plaque de marbre, avec  une bassine , un broc à eau en porcelaine  ainsi qu’un porte savon assorti et un pot d’aisance.  A l’origine, dans les hôtels chamoniards,  l’eau chaude était apportée par le personnel  dans chaque chambre. Parfois il existait un réservoir d’eau chaude à chaque étage, le client allant se  servir lui-même.

 

A Chamonix, les frères Charlet, associés aux frères Simond, propriétaires  de l’Hôtel  de l’Union (construit en 1816), élèvent des bains en 1825 le long de l’Arve. A  partir de 1834, ils font apporter l’eau sulfureuse des Mouilles par des canalisations de bois. Le «Guide du voyageur en Suisse » de Richard  insiste sur « ces bains de santé et de propreté « 

L’Hôtel d’Angleterre fait construire dans ses jardins une « maison des bains » avec neuf chambres de bains proposant eau chaude et eau froide.

L’’Hôtel Mont Blanc aménage  également un bâtiment « bains »  dans le jardin.

De même le Grand Hôtel Couttet et l’hôtel de Paris .

Le XIXème est  le siècle de la révolution hygiénique avec  une notion nouvelle dans le traitement du corps. L’idée de l’hygiène, de la propreté, entre dans les mœurs. Les liens sont  établis entre les épidémies et la propreté des corps. Pasteur, venu à Chamonix en 1860, faisant le constat de la réalité bactérienne ouvre une nouvelle ère dans la conscience collective. D’ailleurs en 1860, la commune fait dresser deux fontaines, l’une au centre du village, l’autre dans le haut du bourg, afin de proposer aux habitants une eau courante accessible à tous.

Cette amélioration de l’’hygiène se développe et connaît un réel  succès auprès des hôteliers en contact avec  une clientèle sensible à ce type de services. Les salles de bains font leur apparition. La publicité  des hôtels  insiste sur ces nouveaux aménagements. A savoir cependant qu’à l’origine le  client devait réserver son horaire car  il fallait faire chauffer l’eau pour alimenter les baignoires.  Les hôtels de l’époque  avaient rarement de l’eau courante en étages. On réservait une pièce où l’on disposait une baignoire et une femme de chambre  apportait l’eau chaude.  C’est avec le début du XXème siècle  que les nouveaux hôtels, comme le Métropole en 1902,  aménagent des salles de bains avec eau courante  et  des lavabos dans chaque chambre.

Ce nouveau siècle  vantant  de plus en plus les vertus du bain,  Chamonix se devait d’offrir à ses clients le « nec plus ultra » du confort et des soins de propreté  de l’époque. On  vante  l’idée d’une  « station climatérique »,  c’est-à-dire une station saine, en contact direct avec la nature, où l’homme peut s’épanouir en toute tranquillité sans miasmes. « Chamonix est la station climatérique la plus fraîche et la plus salubre de toutes les stations estivales et alpestres » peut-on lire sur les affiches publicitaires. De nombreux médecins y vont de leurs recommandations sur la qualité de l’air à Chamonix. La « Société des hôtels réunis » envisage en 1890 de créer une station thermale  aux Mouilles avec un  hôtel de 300 chambres  disposant de bains d’eau sulfureuse et bains de lait ! Ce projet ne voit pas le jour, mais en 1905, à côte du Casino nouvellement construit (piscine actuelle),  est aménagé un établissement d’hydrothérapie à l’eau d’Arve selon le procédé de Mr Kneipp qui  préconisait des bains d’eau froide pour stimuler les organismes  défaillants.

 

La modernité arrivant, la salle de bains privée devient un concept de luxe et de grand confort. Le Savoy, édifié  en 1901, propose 150 chambres dont 100 avec salle de bains. De même le Chamonix- Palace  offre 200 chambres dont 150 avec salle de bains ou encore le Majestic 300 chambres dont 200 avec salle de bains.  Cependant les hôtels plus modestes garderont longtemps une seule salle de bains à l’étage,  mais généraliseront  des lavabos équipés d’eau chaude et d’eau froide dans chaque chambre.

Sources : Le propre et le sale de Georges Vigarello – L’invention de l’habitation moderne de Monique Eleb et Anne Debarre. – Hôtels et palaces. Edition Gilletta – Il était une fois la montagne de Luc Tournier – Les folles années de Chamonix de Gaby Curral Couttet.

 

 

A Vallorcine – Une église lumineuse après cinq années de travaux. Bravo !

Cette petite église de Vallorcine qui se dresse ici depuis 1272 force l’admiration de chacun. Reconstruite en 1288 elle est là, présente, seule au milieu des prés.

Elle semble affronter siècle après siècle le climat rude de cette vallée. Nombreuses sont les coulées de neige qui l’ont atteinte. Elle est touchée en 1594 puis en 1674 et les catastrophes se répètent, particulièrement durant la période du petit âge glaciaire. L’église est menacée si bien que les vallorcins décident en  1720, de la protéger, tout d’abord en construisant une impressionnante « tourne » ( voir article sur la tourne : https://dev.blogdechristineachamonix.fr/la-tourne-de-leglise-de-vallorcine/ ,

En 1756 l’église est reconstruite dans le sens inverse de l’origine pour la mettre à l’abri de cette digue. Quel était son décor ? On peut l’imaginer baroque.

Retable de 1838

Il est probable que le décor d’origine avait été endommagé par l’humidité permanente du lieu. Par ailleurs le maître autel de 1838 avait été détruit en 1958. Les vallorcins avaient peu à peu réaménagé leur église en faisant appel aux artisans locaux dont on retrouve de nos jours la marque dans le mobilier : portail d’entrée, autel, baptistère ou croix de l’entrée du chœur.

Avec le temps, l’église se dégrade, rongée par le salpêtre. La décision est prise de lancer une grande campagne de restauration. De gros travaux sont entrepris en 2017 afin d’assainir l’ensemble du bâtiment. La question s’est posée à propos du décor d’origine. Des sondages intérieurs sont   réalisés  révélant jusqu’à sept restaurations entre le XVIIIe et XXe . Des fresques sont peu à peu mises à jour. Bien que lacunaires, elles sont restaurées et offrent au regard du visiteur quelques très beaux éléments de facture baroque. Au centre de l’arc triomphal on reconnaît Dieu le père auréolé du triangle de la Trinité. Sa main repose sur un globe, image traditionnelle représentant l’Univers dont le Père est le créateur. Sur sa gauche, probablement Saint Paul  tenant un livre (ses épitres) et un glaive (instrument de son martyr ou encore vu comme le glaive de l’Esprit c’est à dire de la parole de Dieu) ,  et sur sa droite probablement Saint Pierre.

Au pied de l’arc à gauche on devine Saint Michel terrassant le dragon et tenant  dans sa main gauche la balance des âmes au moment du jugement dernier. Sur la droite Saint Maurice en légionnaire romain brandissant son étendard reconnaissable à sa croix tréflée . Intéressant car ceux-ci sont deux saints de paroisses voisines : Chamonix et l’abbaye de Saint Maurice en Valais.

Dans la partie supérieure, à la croisée de la nef et du transept, quatre personnages représentent les quatre Pères de l’église : Saint Ambroise, Saint Jérôme, Saint Grégoire et Saint Augustin, docteurs sur qui la foi de la Contre Réforme repose.

L’église est claire, lumineuse, car une fois que notre regard quitte ces fresque restaurées on ne peut que remarquer la douzaine de vitraux qui ornent l’ensemble des fenêtres de cette petite église. Vallorcine a fait appel au Père Kim En Joong, coréen, qui d’emblée a été enthousiasmé par ce lieu étonnant. Prêtre dominicain, Kim En Joong a décoré de nombreuses églises dans le monde entier et aussi dans notre région, notamment à Saint Gervais, Martigny, Hospice du col du Grand Saint Bernard. Après avoir découvert la foi catholique, il raconte sa découverte des vitraux de Chartres « Lorsque je pénétrais à l’intérieur de la nef pour la première fois, je fus ébloui. Il me semblait percevoir comme un avant-goût du ciel. Je n’avais vu nulle part cette lumière diffusée par des baies où dominent mes trois couleurs préférées : le bleu de l’espérance, le rouge de la naissance et le jaune de la joie »…

Et ce sont effectivement ces trois couleurs qui dominent dans l’ensemble des vitraux réalisés à Vallorcine. Peu importe, croyant ou non, nous ne pouvons qu’être éblouis par la beauté ce ces vitraux très modernes dans lesquels aucun thème religieux ne s’impose. Le bleu, le jaune le rouge forment une triade de couleurs qui jouent avec la lumière extérieure. Parfois un trait ou une tache plus sombre voire une autre teinte met en valeur ces couleurs lumineuses. Il y a de la gaieté, de la joie mais aussi pour des croyants de la profondeur et de l’espoir.

L’église de Vallorcine, témoin d’un passé séculaire, entre dans la modernité. Bravo à ceux qui se sont battus pour initier un tel projet et le mener à bien.

Sources :  Brochure de l’église de Vallorcine . Dominique Ancey – Revue Nature et patrimoine n°66. Article Jean Paul Roudier et  Dominique Ancey. Livre : Baroque un Art retrouvé (éditions Rossat-Mignod)

Pour en savoir plus sur l’église de Vallorcine je vous recommande le site  : https://www.eglise-vallorcine.fr/

Pour en savoir plus sur le Père Kim en Joong :https://www.kimenjoong.com/

La première ascension à ski du col de Balme

Cette année 2023 est inaugurée la nouvelle télécabine de Charamillon.  Beaucoup se souviennent des diverses remontées mécaniques qui ont fait l’histoire de ce domaine de ski, mais skier sur ces pentes débonnaires n’a pas toujours été facile !

A la fin du XIXème on employait  bien largement des raquettes  pour se déplacer d’un village à l’autre.  A Chamonix le ski arrive avec Joseph Couttet qui avait découvert grâce à des amis norvégiens ce moyen de déplacement et nous devons au docteur Michel Payot la popularisation du ski.

Celui-ci, fan de cette activité incite ses amis guides à utiliser ce moyen de transport  pour se mouvoir sur la neige. Il essaie divers type de skis et  estime que « la longueur idéale des skis doit être de 2 mètres pour un poids moyen de 75kgs et recommande que pour remonter la pente il faut fixer une bande de peau de phoque de 0.80 de longueur environ  qui doit être fixée sous le ski au moyen de petits clous disposés de telle manière que les poils se lissent en poussant le ski et se rebroussant pendant le recul. Et il convient de se munir d’une paire de chaussons en feutre se mettant par-dessus la chaussure.

Il est le premier à s’aventurer sur des pentes un peu plus raides et fait ses premiers essais  au col de Balme le 12 février 1902

                                                                             Texte Michel Payot :

….La vallée de Chamonix est actuellement couverte d’une couche de neige dont l’épaisseur varie entre un et trois mètres. Les skis permettent de gravir de fortes pentes avec un minimum de fatigue. Les longs patins de frêne s’enfoncent que de quelques cm sous le poids du corps et l’effort pour les faire glisser parallèlement est insignifiant.

Le 12 février par un temps incertain profitant d’une éclaircie nous partions du village du Tour accompagné du guide  Joseph Ducroz pour faire l’ascension du col de Balme. Mon brave compagnon employait les skis pour la deuxième  fois et il partit avec la certitude de ne pouvoir effectuer le quart du trajet et il comptait sans son énergie et son endurance. Le départ eut lieu du Tour à 1heure de l’après midi. La première partie de l’ascension est la plus pénible en raison de pentes, qui sont très accentuées. Nous suivions la direction des poteaux téléphoniques et nous arrivons sans incidents aux chalets de Charamillon. Je tire ma montre : il est deux heures exactement. « Eh bien », dis-je à Ducroz, « pensez vous atteindre le sommet maintenant ? » « Oh ! Oui !, ça va très bien et si nous allons toujours de ce train là, en moins de 40mn nous sommes au col ! »

Mais il comptait sans l’état de la neige qui, sur le plateau de Charamillon à l’abri du vent, s’était ramollie sous l’action du soleil et collait aux skis. La marche devint pénible et nous regrettons vivement de n’avoir pas emporté un peu d’huile pour en frotter nos patins. Cependant, après une demi-heure de marche nous retrouvons, avec la bise, tantôt la neige sèche et en poussière, tantôt la neige dure et nous arrivons au sommet du col à 2h48mn….Les chalets de Balme disparaissent sous la neige et ceux du col sont crépis d’une couche de 20cm de neige tassée et bizarrement sculptée par le vent âpre et violent qui y souffle sans cesse..

La tourmente approche, et après une demi-heure de repos nous songeons à la descente. Je laisse mon guide Ducroz dont l’équilibre sur les skis à la descente est peu stable, partir le premier. En quelques secondes il a parcouru la moitié du chemin entre le col et les chalets de Charamillon. Une magnifique culbute arrêt sa course : l’homme a totalement disparu. Deux skis s’agitent comme les ailes d’un moulin à vent au dessus de la neige. Il est trois heures et demie, je me lance à mon tour et passe à vingt mètres au dessus de Ducroz qui achève à peine de reprendre son équilibre sur ses longs patins. La glissade vertigineuse continue, et 25mn après notre départ du sommet nous arrivons chez mon brave compagnon au moment où la famille prend place pour le thé.

Voilà donc une course d’hiver faite par plusieurs mètres de neige molle avec plus de rapidité qu’on ne le fait généralement en été. ..A notre avis l’emploi de skis constitue le meilleur moyen pour faire rapidement avec un minimum de fatigue les ascensions d’hiver…

     Photo frères Bisson : col du Géant

Le 24 février de la même année accompagnés des guides Alfred Simond et Joseph Ravanel, nous avons Henri Devouassoud , Joseph  Couttet, René Payot et moi effectué la traversée du col du géant en skis avec descente sur Courmayeur en 14 heures par la neige et le brouillard  durant la moitié du trajet

Michel PAYOT

Sources  : Bulletin CAF 1903-1904  -Photos  fonds Jean Fabre

Petite histoire du bar de la Terrasse devenu aujourd’hui Rose du Pont

Nous voilà face à un des bâtiments les plus emblématiques de Chamonix  le fameux bar La Terrasse dont l’architecture Art Nouveau sublime le centre ville.

Depuis le printemps dernier les nouveaux propriétaires se sont attaqués à la restauration et  à la réhabilitation de ce bâtiment étonnant. En mauvais état, la charpente de bois exotiques (courant à l’époque)   a résisté au temps ce qui a permis De conserver les formes typiques de cette expression artistique de la Belle Epoque : L’Art Nouveau. Nul ne connaît l’origine exacte de ce bâtiment  qui remplaçait un ancien déjà existant.  Certains racontent qu’il proviendrait d’une exposition internationale : Paris ? Interlaken ? Bruxelles ?   C’est vrai qu’il était courant à l’époque de démanteler un édifice pour le reconstruire ailleurs mais aucun document à ce jour ne nous en donne l’origine. Il reste cependant le témoin d’une période faste à Chamonix celle que l’on appelle la Belle Epoque mais la Terrasse est également un témoin historique de l’urbanisation du centre ville.

Dès le début du XXème Chamonix connaissant  un développement économique rapide,  le carrefour essentiel du village entre la rue provenant de l’église et la passerelle qui franchissait l’Arve , devient un lieu de commerces multiples. C’est la que  Pierre Joseph Payot, originaire du hameau  de la Molard achète vers 1825-1830 une maison située au centre. Quincaillerie, objets sculptés, cristaux sont le fond de commerce de la boutique. Il est rapidement aidé par son fils François devenu maître de poste ouvrant par la même occasion un bureau de change.

La maison s’agrandit formant trois parties distinctes. En 1860 Venance Payot un des  fils ouvre en bord d’Arve une sorte de muséum qui connaît un très grand succès. Il construit quelques années plus tard une grande maison un peu plus en amont  où il ouvre une  boutique.

Il  lègue à son frère Florentin  cette partie de la maison  tournée vers l’Arve. Celui-ci aménage un hôtel et transforme l’ancienne boutique de son frère en un bar – restaurant. Il prend alors son nom : Hôtel Pension de la Terrasse,  nom conservé jusqu’en 1890 !

 A la mort de Florentin sa fille Marie Adèle et son mari Philippe Thévenet héritent de l’ensemble.  La Terrasse devient « Pension- hôtel -café » puis uniquement « café- restaurant ». Veuve en 1903 elle épouse Mr Birkigt (d’origine belge)  mais conserve à son nom le restaurant. Il  semblerait que ce soit Marie Adèle qui  élève ce bâtiment construit  en encorbellement sur l’Arve (d’ailleurs au dessus du lavoir utilisé au pied de l’ancien bâtiment).

Elle le loue puis le vend en  1918. Hélas le  nouveau propriétaire provoque le scandale car il y a de nombreuses plaintes à propos de passage de « femmes de joie » à la pension  pour les soldats américains où également de jeunes mineurs chamoniards  semblent s’y rendre régulièrement. La Terrasse serait devenue un lieu de débauche !

Dès lors de nombreux propriétaires se succèdent. Le bâtiment n’est pas toujours entretenu avec goût. Certains architectes se succèdent mais souvent d’une manière maladroite.

On doit à Jenny  Galton qui , dans les années 1980,est  gérante du lieu  et désire redonner un aspect prestigieux e à ce bar. Elle fait  appel à Bernard Ferrari, architecte. Il donne au bâtiment cette couleur violet-mauve  dont on avait retrouvé trace par sondage. Il remet en  état le plafond d’origine, il réutilise les anciens lustres, et  y aménage d’anciens meubles Art Nouveau. La Terrasse revit grâce à Jenny mais hélas  à son départ le bâtiment ne sera plus entretenu.

En 2022 enfin un nouveau propriétaire amoureux de ce bâtiment  décide de lui redonner une allure  Belle Epoque. Ici vous découvrirez cette expression artistique qu’est  l’expression Art Nouveau se mêlant à un décor néo classique formé essentiellement  de stucs à l’ancienne de  miroirs et  luminaires  où jouent la lumière et le décor naturel.

La Terrasse devient Rose du Pont

Une très belle réussite.

C’est quoi l’Art Nouveau :

Un art qui se développe entre 1890 et 1914 en opposition à l’art néo-classique et dont l’expression artistique est essentiellement tournée vers la nature, la reproduisant souvent avec des fleurs , et jouant avec les formes courbes et contre-courbes.

                                                      Les divers aspects de la Terrasse au cours du temps

Sources : Gallica – Archives Amis du Vieux Chamonix

Une famille chamoniarde de passionnés : Les Claret horlogers 

Au début du XIXe siècle, l’horlogerie se modernise. La Suisse toute proche est, depuis le XVIIe siècle, un pays fondateur de l’horlogerie.

Le matériel horloger délicat nécessite bien souvent réparation et entretien. On a besoin d’artisans au savoir faire que Genève trouve auprès d’ouvriers souvent originaires du monde paysan, d’où l’implication de certains vallorcins. C’est ainsi que Jean François Bozon s’initie à ce travail de précision. Sa fille Rosine épouse Jean Marie Claret qui se forme auprès de son beau père. Ils ont deux fils, Joseph et Clément.

A Cluses a été créé en 1848 l’Ecole Nationale d’Horlogerie. On se sacrifie pour que Joseph puisse suivre la formation mais à condition que celui-ci paie des études d’horlogerie à son frère Clément. Ce qu’il fera, assurant le financement des études de son frère.

  Clément Claret à l’école d’horlogerie de Cluses

Clément se passionne pour ce matériel de précision. Il adore étudier ces mécanismes pour comprendre ce qui se cache derrière la mesure du temps qui parfois peut paraître si mystérieux. Manipuler ces montres ou ces horloges demande une patience infinie et une précision extrême. L’horlogerie devient vite une passion qu’il saura transmettre à ses descendants. Après l’école, il travaille plusieurs années chez Pateck et chez Philip à Genève. On peut supposer qu’il devait être un sacré bon ouvrier pour pouvoir intégrer ces ateliers déjà renommés .

Dès 1880 Chamonix entre dans cette période faste qu’est la Belle Epoque , Clément comprend que son pays d’origine peut enfin lui offrir la possibilité de vivre de son métier. Il épouse Marie Elise Simond, ils achètent une maison en 1888 à la famille Payot.

C’est toujours cette même petite maison au 114 rue Vallot qui va voir se succéder de père en fils ces Claret passionnés. Son fils Jean François, lui aussi enthousiasmé par ces petites mécaniques, fait l’école de Cluses. Il travaille en collaboration avec son père. La saison d’été est forte, les visiteurs ont toujours besoin de faire réparer leurs montres et la réputation de la maison Claret n’est plus à faire ! L’atelier regorge d’objets mystérieux pour les néophytes : loupe visière, rouages, ressorts, carillons, une multitude d’objets minuscules entretenus avec soin par la famille. Et l’hiver ce sont les habitants de la vallée qui apportent leurs horloges et montres afin de les faire réparer. On fait totalement confiance au savoir faire de Jean François qui tient la boutique jusqu’en 1950.

                                                                           Le magasin en 1960

Et la passion continue chez les Claret puisque Georges (fils de Jean François) entame lui aussi ses études d’horlogerie à Cluses où il sera pensionnaire rentrant à Chamonix chaque WE en vélo ! Il succède à son père dès la fin de son service militaire. Tous à Chamonix lui confient avec plaisir leurs veilles pendules ou montres, car il saura toujours les réparer. On sent chez lui sa passion pour ce métier si original et chacun apprécie son extrême gentillesse et ce regard qui s’éclaire lorsqu’on lui apporte une vieille pendule de famille.

Et Pierre, tel son père, son grand père ou son arrière grand père continue dans cette passion familiale. D’ailleurs, à l’âge de 10 ans il adore aller à l’atelier paternel ! Il démonte et remonte les pendules sans aucun problème. La passion est passée de père en fils ! Il se forme à l’horlogerie comme ses ancêtres mais rajoute une formation en bijouterie car là aussi manipuler et travailler sur des pierres précieuses nécessite cette méticulosité, cette précision, ce savoir faire commun à l’horlogerie. Il aime son métier. Vous pouvez lui apporter une vielle montre perdue au fond d’un tiroir ou une pendule provenant de votre grenier il aura un plaisir immense à lui redonner vie !

Au Col de Balme

Dans ces belle journées d’arrière-saison, le col de Balme est pour nous tout un lieu de randonnée contemplative en raison de ce paysage exceptionnel qui s’ouvre sous nos yeux à chaque instant.

Il ne faut pas oublier que, durant des siècles, le passage par ce col était le plus souvent utilisé par les voyageurs se rendant en Valais. D’ailleurs, nombre de tableaux montrent le col avec les fameuses bornes marquant la frontière entre Valais et royaume de Piémont Sardaigne.

Goethe, le 6 novembre 1779, emprunte cet itinéraire. Sa description rend avec un regard très juste ces atmosphères propres au mois de novembre où les nuages jouent avec le paysage…. »Il est plus intéressant de vous dire comment les esprits de l’air semblaient se faire la guerre sous nos pieds…nous montâmes toujours avec plus d’ardeur… Il (le vent) soufflait par le col entre deux sommets et repoussa le brouillard dans la vallée. L’aspect avait un caractère étrange.  Le haut du ciel , par-dessus les crêtes des montagnes, était nuageux;  à nos pieds, nous voyions à travers le brouillard qui se déchirait quelquefois , la vallée entière de Chamonix et entre ces deux couches de nuages, les sommets des montagnes étaient tous visibles. »

Berthout Van Berchem, en 1790, évoque dans son guide « Itinéraire de la Vallée de Chamonix » le passage par le col de Balme, « depuis le col de ce nom il faut s’écarter un peu de la route pour aller sur la plus haute limite du Valais et de la Savoye afin de jouir d’un très beau point de vue !

Puis durant tout le XIXe siècle on voit un grand nombre de voyageurs arriver ou quitter Chamonix par ce passage relativement facile à emprunter et moins compliqué que par Tête Noire et Vallorcine. A la lecture des divers ouvrages une auberge très simple existe.

Alexandre Dumas, en 1832 en parle dans son ouvrage «  Impressions d’un voyage en Suisse » »,au loin se découpant dans un ciel bleu le toit rouge de cette bienheureuse maison puis ses murailles blanches qui semblaient sortir de terre…Il se précipite à l’intérieur et peu après en ressort conduit par son guide pour admirer le paysage  » ...et comme une toile se levait sur une magnifique  décoration   je saisis, avec un plaisir mêlé d’effroi de me voir si petit au milieu de si grandes choses tout l’ensemble de ce panorama semblait le palais d’été du dieu de l’hiver

En 1833, le manuel du voyageur d’Ebel recommande ce passage aux voyageurs. l’auberge du col est construite en bois  vers 1840 côté français. Le bail est attribué le 8 décembre 1840 à Pierre Joseph Payot  (grand père de Venance Payot) avec doits de vente de vins, eaux de vie et liqueurs.

Jean Pierre Pictet en 1840 dans son ouvrage « Chamouny, de Sixt, des deux saint Bernard » évoque l’hospice du Col de Balme petite auberge où l’on peut se rafraîchir et même coucher.

En 1856, le guide Joanne parle de l’hospice du col de Balme qui ouvre quatre mois de l’année. On y trouve  » des vivres, des rafraîchissements et même des lits en cas de besoin « 

En 1861 le tracé de la frontière est réalisé avec précision.  La bâtisse de bois devient ruine Le refuge est alors reconstruit un peu plus en amont côté suisse  vers 1865. Le bâtiment en pierre devient une auberge plus confortable.

En 1874, Gabriel de Mortillet, dans son guide de Haute Savoie, parle de la magnifique vue sur la vallée de Chamonix et la chaîne du mont Blanc et évoque le pavillon du Col de Balme… » ouvert pendant quatre mois de l’année aux prix des grands hôtels ! »

Whymper, ce grand alpiniste, mais également immense marcheur, décrit dans son guide de Chamonix Mont Blanc ,avec détails l’itinéraire emprunté pour accéder au col.

Et avec l’arrivée du ski, le Col de Balme est gravi pour la première fois en 1902 en skis par le docteur Michel Payot et son ami Ravanel le Rouge, une sacrée belle performance à l’époque !

Dans les années 1930, un grand projet est envisagé pour la construction d’une route vers le Col de Balme sur l’initiative de Charles Vallot et du TCF (Touring Club Français), où l’on imagine une nouvelle route  pour les visiteurs en voiture qui  qui permettrait de favoriser la distribution du lait de ces alpages vers l’ensemble de la vallée !

OUF ! Le projet finalement ne s’est jamais réalisé.

Et dans l’histoire plus tragique du col, n’oublions pas les nombreux essais de passages des juifs cherchant désespérément échapper à la folie nazie. Combien de souvenirs douloureux marquent ce paysage si exceptionnel. Ne l’oublions pas.

Puis l’aménagement des premières remontées mécaniques changera peu à peu le destin de ce col qui a vu passer tant de voyageurs curieux ! Mais il reste un passage obligé pour les amateurs de randonnée cherchant à boucler le Tour du mont Blanc .

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Histoire plus ancienne du col  souvent méconnue

( extrait de l’histoire de Savoie  de Paul Guichonnet)

Une première fois en 1476, lorsque le Comte de Savoie tenta de reprendre pied en Valais, d’où les Valaisans l’avaient chassé en passant par le col de Balme, évitant le col de la Forclaz, il déboucha sur Martigny… Mais selon la tradition, les femmes les accueillirent avec nombre de pichets de vin et la troupe fut cueillie facilement par les troupes valaisannes.

Trois siècles plus tard, le 25 décembre 1813, le col de Balme vit défiler la débâcle des troupes napoléoniennes en essayant d’échapper aux autrichiens qui les poursuivaient. Par douze degrés au-dessous de zéro et des mètres de neige, 800 hommes menés par Mr Rambuteau, préfet de l’empire en Valais, réussirent finalement à franchir le col et descendre à Chamonix.

Sources : Divers ouvrages nommés ci-dessus dans l’article.

                                                                Tableau : Col de Balme , Ange Abrate

 

Petite histoire du refuge du Couvercle

GUIDO REY  (alpiniste, écrivain italien):

 » LE COUVERCLE EST SITUE DANS LE LIEU LE PLUS ADMIRABLE DU MONDE

Fin XIXe, les alpinistes se rendant aux pieds des montagnes mythiques situées au-dessus de la Mer de Glace avaient pour habitude de s’abriter sous une grosse pierre, où avait été  édifié une simple cabane  dite la « cabane de Pierre à Béranger » située sur la rive gauche du glacier de Talèfre. Modeste cabane en bois construite en 1867 adossée à un énorme bloc à 2466m.

Celle-ci est détruite en 1903 . Elle est remplacée en 1904 par une une autre cabane prévue pour 12 personnes et  située plus en amont à 2698m sur la rive droite du glacier de Talèfre . Elle est inaugurée le 7 août 1904. C’est monsieur Lucien Tignol, délégué du C.A.F de la section de Chamonix, remplaçant le docteur Payot empêché, qui préside la petite fête d’inauguration. La cabane s’appellera désormais cabane du Couvercle car édifiée à l’abri de cette immense pierre de 20mètres de long. Agrandie en 1911 la cabane peut accueillir une trentaine de personnes avec un dortoir, un réfectoire et une chambre pour un gardien. Le dernier gardien a été le célèbre guide Joseph Ravanel, dit le Rouge, auteur de nombreuses premières décédé dans l’automne 1931.

Dès 1929, en raison d’une fréquentation de plus en plus importante, la commission des travaux en montagne du C.A.F décide la construction d’un grand refuge à 80 mètres de l’existant.

Grâce à la donation de Mr F.  Lung, les travaux commencent en 1931 sous les ordres de Mr Bernadet. (Président de la section de Chamonix du C.A.F). Le bâtiment en granit mesure 11 m 40 par 8 m 15 pour 8 m 80 de hauteur au faîtage, deux grandes terrasses l’entourent. Sa capacité d’accueil est de 106 personnes réparties en deux dortoirs et un réfectoire de 80 places. Les dortoirs sont par la suite cloisonnés en cinq dortoirs indépendants. L’intérieur est en lambris de bois et parquet de chêne. En ces années le monde montagnard est encore un  milieu religieux et le lundi 29 août 1932 a lieu l’inauguration devant plus de 500 personnes. Une messe solennelle est célébrée et chantée par la chorale de Chamonix. Le chanoine Rhuin lit un télégramme de S.S. Pie XI, puis le pasteur Dartigue célèbre un office protestant.  De nombreux discours sont prononcés dont  celui de Mr Alfred Tairraz, premier adjoint de Chamonix. Durant le déjeuner, pendant que la chorale chante, le capitaine Thoret, avec son avion plane longuement au-dessus de l’assistance.

20 ans après, un nouveau projet est de nouveau mis sur pied et terminé en début de l’été 1952. Il est le plus important et le plus moderne de France pour l’époque, pouvant accueillir jusqu’à 200 personnes. On aménage 7 dortoirs. Sur les bases duu précédent refuge, celui-ci est également en granit, une couverture de cuivre rouge sur une solide charpente sert de paratonnerre et de mise à la terre. L’inauguration a lieu le dimanche 10 août 1952 en présence de Mr Masson secrétaire d’état. A 10 heures, une messe est célébrée sous un magnifique soleil malgré l’énorme orage de la veille.

Chacun à Chamonix se souvient du gardien du refuge Ulysse Borgeat (et de sa sœur Gilberte Maerten) qui, avec sa gentillesse légendaire, est resté 16 ans aux commandes du refuge.

Depuis quelques temps, le site est moins fréquenté, mais il reste un objectif important pour de nombreux alpinistes car le refuge reste un point de départ idéal pour accéder aux sommets mythiques du massif: l’aiguille Verte, le   Moine, les Droites, la pointe Isabella, etc…

Le refuge étant devenu un peu surdimensionné, il a donc été décidé de le rénover. Sa capacité est divisée  par deux. Au lieu des 128 couchages, celui-ci n’en abrite plus que 64. La rénovation s’est faite dans l’optique de préserver l’héritage architectural, le confort des occupants et l’environnement exceptionnel de ce site classé du Mont-Blanc, en respectant les volumes existants et la forme d’origine.

Il est inauguré ce 23 juillet 2022. 

LISTE DES GARDIENS

1911 / 1925 François Couttet dit François à la comtesse, remplacé par Léon Claret Tournier qui restera en place jusqu’en 1925
1926 / 1931 Ravanel le Rouge devient le gardien, le dernier dans le vieux refuge.
– 1932 / 1945 Arthur dit Arthur au rouge (fils de Ravanel le rouge) est le premier à garder le nouveau refuge.
– 1946 / 1960 Clément Com aidé par Raymond Claret Tournier C’est eux qui assisteront aux travaux d’agrandissement du refuge au cours des été 1950 et 1951. Puis Alexis Caux à partir de 1950.
– 1961 / 1962, Clément Hugon et Alexis Caux .
– 1963 / 1979 Ulysse Borgeat et Gilberte Maerten (sa sœur)  en deviennent les gardiens.
– 1980 / 1985 Régis Mugnier est le gardien en titre. Il connaît bien le refuge car il a travaillé avec Gilberte et Ulysse.
– 1986 : Pascale et Michel Tavernier à cheval sur le XXème et XXIème siècle.
– 2015 : Christophe Lelièvre, après onze ans à la Charpoua, migre de l’autre côté de l’arête des Ecclésiastiques

 Sources : Mémoire d’Armand Comte guide, cristallier . Archives et photos Association Amis du Vieux Chamonix – Archives CAF – Revues CAF . Refuge du Couvercle.

L’origine des chalets norvégiens à Chamonix

Pourquoi à Chamonix existe-t-il des chalets d’inspiration de Norvège ( du moins de certaines régions de montagnes de Norvège ?

On peut s’en étonner, mais il y a une histoire !

Dans les années 1950 armateur marseillais avait pour habitude d’aller skier en Norvège. Un jour, lors d’une de ses sorties, il est heurté par un skieur très digne qui aussitôt s’excuse et l’invite à venir boire un verre. Ce monsieur se présente : « je suis Olav V, roi de Norvège » et notre industriel se présente de même. Ils font connaissance, le roi l’invite chez lui et ils finissent par créer de vrais liens d’amitié. Il va régulièrement en Norvège et finalement épouse une norvégienne,

D’origine marseillaise il fonda ave Paul Freitag en 1954 la Société d’équipement Sportif et Touristique de Super-Chamonix (SESTSC), destinée à équiper tout le secteur de la Flégère . avec :
– un téléphérique des Praz à la Flégère, permettant l’accès au plateau,
– une télécabine et 4 téléskis constituant le domaine skiable de Super-Chamonix,
– un ensemble d’hôtels et de chalets, entre la Flégère et les Evettes, exposés plein sud face au Mont Blanc, une sorte de village qui devait s’appeler « Super Chamonix » composé d’un ensemble d’hôtels et de chalets, exposés plein sud face au Mont Blanc.

L’idée était de faire un ensemble immobilier à l’esprit norvégien. Aussi pour ce faire à Chamonix on construisit un vrai chalet transporté pièce par pièce de Norvège qui devait servir d’exemple pour les acheteurs potentiels.

Le projet est abandonné, trop de risques d’avalanches.

Super Chamonix n’existera pas mais le chalet, lui est resté et certains architectes, séduits par ce type d’habitat construiront ainsi quelques-uns de ces chalets norvégiens que l’on peut voir dans la vallée.

Sources : Archives départementales, archives privées

Quand le futur fait resurgir le passé ! La saga Vallot se poursuit

Une superbe idée prend naissance à l’observatoire Vallot de la vallée. Le CREA (Centre de Recherches de l’Ecosystème en Altitude), qui occupe les lieux depuis une vingtaine d’années, lance le projet d’une belle rénovation de cet ancien observatoire de Joseph Vallot avec la création d’un bâtiment complémentaire indispensable à son activité. Le projet se veut être dans l’esprit du lieu.

N’oublions pas que Joseph Vallot a, depuis la création de cet observatoire, désiré que ce petit chalet soit toujours consacré aux recherches scientifiques, recherches qui sont l’essence même du CREA : mieux connaître le milieu alpin, comprendre l’adaptation de la faune et de la flore aux changements climatiques et étudier ces phénomènes nouveaux qui en découlent. Il est évident que Joseph Vallot aurait adhéré à ces recherches modernes indispensables à une meilleure connaissance du monde alpin qu’il affectionnait particulièrement.

Le CREA a un rôle essentiel dans le milieu scientifique, il est unique en France. Cette équipe soutenue par une quantité de bénévoles passionnés par le monde alpin en pleine mutation a réellement besoin de « pousser » les murs.

Pour ce faire, celui-ci s’est lancé dans le projet d’un nouvel édifice dominé par une  idée de sobriété et d’éco-conception. Il se doit d’être un exemple environnemental à l’image de leurs recherches. Le CREA a fait appel à l’architecte Jacques Félix Faure, un grand spécialiste de bâtiments écologiques. Un beau projet dont la ville de Chamonix pourra être fière puisqu’elle est partie prenante dans ce cette entreprise. En complément, le jardin dans lequel l’observatoire a été construit deviendra un jardin expérimental ouvert au grand public afin de partager dans la vallée avec les néophytes une meilleure connaissance du monde alpin.

On ne peut que se réjouir de la rénovation du petit chalet observatoire  Vallot, de l’aménagement d’un jardin expérimental et de la création d’un nouveau laboratoire.

Joseph Vallot qui a tant apporté à Chamonix et au Mont Blanc avec son cousin Henri serait certainement heureux de voir ce projet se réaliser dans leur observatoire d’origine.

140 ans après sa création, l’observatoire peut redevenir un acteur majeur de la recherche scientifique en montagne qu’ils avaient initiée dans la vallée de Chamonix.

PETIT RAPPEL A PROPOS DE JOSEPH VALLOT :

Il découvre Chamonix en 1875 et réalise sa première ascension du mont Blanc en 1881.  Rapidement, il décide de faire construire un observatoire-laboratoire couplé avec un refuge pour les guides  en altitude où il pourra se livrer à de nombreuses expériences scientifiques. Dans la foulée, il construit un autre observatoire près de sa villa afin de travailler en corrélation avec le premier.  Il passe entre autre trois jours au sommet du mont Blanc afin de prouver que l’homme peut s’adapter à la vie en altitude. D’ailleurs monter au sommet du mont blanc et y passer plusieurs journées pour ses recherches ne lui cause aucun problème. En 1898 il passe 43 jours à l’altitude de 4350m lors de la construction de l’observatoire. Ses travaux menés pendant une quarantaine d’années couvrent de multiples domaines : botanique, glaciologie, construction, géologie, photographie, médecine, physiologie, cartographie, alpinisme, météorologie, spéléologie, ont été reconnus comme présentant un intérêt scientifique majeur.

Ses recherches ont fait faire un grand pas à la connaissance du massif du mont Blanc. Chamonix ne peut que s’en féliciter. Et un grand merci au CREA qui décide de poursuivre cet élan généré par Joseph Vallot et son cousin Henri et son neveu Charles.

Afin  de mieux connaître ce personnage hors du commun je ne peux que vous recommander ce petit ouvrage passionnant écrit par Eliane Patriarca, journaliste.

Sources : CREA. – Archives Vallot de l’association des Amis du Vieux Chamonix

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