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Étiquette : Chamonix

De l’usage des bains dans l’hôtellerie chamoniarde

Au cours du XIXème siècle la vallée de Chamonix voit  le nombre de visiteurs croître de jour en jour. On compte 10 hôtels en 1860 lorsque  la Savoie devient française et dès lors Chamonix se développe rapidement. Les chamoniards édifient auberges, petits hôtels familiaux, hôtels de grand confort puis hôtels de luxe.

Un hôtel dit « confortable », au début  du XIXème siècle,  se devait de proposer à ses clients dans chaque chambre un « meuble  de toilette » recouvert d’une plaque de marbre, avec  une bassine , un broc à eau en porcelaine  ainsi qu’un porte savon assorti et un pot d’aisance.  A l’origine, dans les hôtels chamoniards,  l’eau chaude était apportée par le personnel  dans chaque chambre. Parfois il existait un réservoir d’eau chaude à chaque étage, le client allant se  servir lui-même.

 

A Chamonix, les frères Charlet, associés aux frères Simond, propriétaires  de l’Hôtel  de l’Union (construit en 1816), élèvent des bains en 1825 le long de l’Arve. A  partir de 1834, ils font apporter l’eau sulfureuse des Mouilles par des canalisations de bois. Le «Guide du voyageur en Suisse » de Richard  insiste sur « ces bains de santé et de propreté « 

L’Hôtel d’Angleterre fait construire dans ses jardins une « maison des bains » avec neuf chambres de bains proposant eau chaude et eau froide.

L’’Hôtel Mont Blanc aménage  également un bâtiment « bains »  dans le jardin.

De même le Grand Hôtel Couttet et l’hôtel de Paris .

Le XIXème est  le siècle de la révolution hygiénique avec  une notion nouvelle dans le traitement du corps. L’idée de l’hygiène, de la propreté, entre dans les mœurs. Les liens sont  établis entre les épidémies et la propreté des corps. Pasteur, venu à Chamonix en 1860, faisant le constat de la réalité bactérienne ouvre une nouvelle ère dans la conscience collective. D’ailleurs en 1860, la commune fait dresser deux fontaines, l’une au centre du village, l’autre dans le haut du bourg, afin de proposer aux habitants une eau courante accessible à tous.

Cette amélioration de l’’hygiène se développe et connaît un réel  succès auprès des hôteliers en contact avec  une clientèle sensible à ce type de services. Les salles de bains font leur apparition. La publicité  des hôtels  insiste sur ces nouveaux aménagements. A savoir cependant qu’à l’origine le  client devait réserver son horaire car  il fallait faire chauffer l’eau pour alimenter les baignoires.  Les hôtels de l’époque  avaient rarement de l’eau courante en étages. On réservait une pièce où l’on disposait une baignoire et une femme de chambre  apportait l’eau chaude.  C’est avec le début du XXème siècle  que les nouveaux hôtels, comme le Métropole en 1902,  aménagent des salles de bains avec eau courante  et  des lavabos dans chaque chambre.

Ce nouveau siècle  vantant  de plus en plus les vertus du bain,  Chamonix se devait d’offrir à ses clients le « nec plus ultra » du confort et des soins de propreté  de l’époque. On  vante  l’idée d’une  « station climatérique »,  c’est-à-dire une station saine, en contact direct avec la nature, où l’homme peut s’épanouir en toute tranquillité sans miasmes. « Chamonix est la station climatérique la plus fraîche et la plus salubre de toutes les stations estivales et alpestres » peut-on lire sur les affiches publicitaires. De nombreux médecins y vont de leurs recommandations sur la qualité de l’air à Chamonix. La « Société des hôtels réunis » envisage en 1890 de créer une station thermale  aux Mouilles avec un  hôtel de 300 chambres  disposant de bains d’eau sulfureuse et bains de lait ! Ce projet ne voit pas le jour, mais en 1905, à côte du Casino nouvellement construit (piscine actuelle),  est aménagé un établissement d’hydrothérapie à l’eau d’Arve selon le procédé de Mr Kneipp qui  préconisait des bains d’eau froide pour stimuler les organismes  défaillants.

 

La modernité arrivant, la salle de bains privée devient un concept de luxe et de grand confort. Le Savoy, édifié  en 1901, propose 150 chambres dont 100 avec salle de bains. De même le Chamonix- Palace  offre 200 chambres dont 150 avec salle de bains ou encore le Majestic 300 chambres dont 200 avec salle de bains.  Cependant les hôtels plus modestes garderont longtemps une seule salle de bains à l’étage,  mais généraliseront  des lavabos équipés d’eau chaude et d’eau froide dans chaque chambre.

Sources : Le propre et le sale de Georges Vigarello – L’invention de l’habitation moderne de Monique Eleb et Anne Debarre. – Hôtels et palaces. Edition Gilletta – Il était une fois la montagne de Luc Tournier – Les folles années de Chamonix de Gaby Curral Couttet.

 

 

Un hôtel emblématique du XIXème : l’hôtel de l’Union

Dès 1815 avec la fin de l’empire les visiteurs se font de plus en plus nombreux et le foires connaissent un succès grandissant. La commune de Chamonix déplore qu’il n’y est que 3 hôtels et 5 cabarets et incite l’État à autoriser la construction d’hôtels. 

C’’est ainsi qu’en 1816 les frères Charlet (fils du notaire Charlet) associés à Mr Simond (propriétaires de l’hôtel du Nord) font appel à un architecte genevois Mr Sismondi et ouvrent un magnifique et grand hôtel en plein centre de Chamonix, une révolution à l’époque car imposant par sa taille, son architecture originale avec son fameux balcon à portiques.

 L’hôtel de l’Union fait fort impression et les voyageurs de l’époque sont très étonnés de son confort « on y trouve même les journaux de tous les pays, une boutique naturaliste, ainsi que les meilleurs vins !  … En 1824 « le guide du voyageur en Suisse » signé par Mr Richard, met l’accent « sur les bains de santé et de propreté » Ces bains situés près de l’Arve sont à l’image de cette nouvelle idée qui fleurit à Chamonix de créer une station « climatérique ». Les bains, nouveautés du XIXème siècle, sont encore rares hormis les stations thermales.  Les frères Charlet, propriétaires des terrains des Mouilles où coule une source sulfureuse ont l’idée d’apporter dès les années 1825 cette eau bienfaisante à l’hôtel puis en 1834 directement par des canalisations de bois, qui seront emportées plusieurs fois par les crues de l’Arve.

Nombreux sont les visiteurs de marque qui prennent pension à l’Union.

John Ruskin dès son 1er séjour avec ses parents en 1833 puis ensuit lors de ses voyages solitaires y séjournera régulièrement. On apprend ainsi que « vingt-deux personnes y sont attachées, que l’on y est parfaitement servi, les chambres sont bien tenues, qu’il y a des salles à manger à chaque étage, que l’on propose des diners de table d’hôte à 1,5, et 9 heures mais que l’on peut aussi se faire servir des repas chez soi à l’heure qu’il convient qu’il y a une salle de billard, des journaux français, des sommeliers parlant plusieurs langues…

Dessin Jules Hébert. Henriette d’Angeville à l’hôtel de l’Union avant son départ pour le mont Blanc

En 1836 y descendent Georges Sand et ses deux enfants, Franz Litz, et Marie d’Agoult.  Henriette d’Angeville en 1838 séjourne dan cet hôtel qu’elle trouve particulièrement confortable.

L’hôtel connaît une nouvelle dynamique avec l’arrivée de Mr Eisenkrammer.  1er sommelier de l’hôtel qui  loue dès 1838 l’Union à son patron et qu’il achète finalement  en 1844. Il épouse ensuite Marie Henriette Simond (nièce de Mme Coutterand et fille de son ancien patron). Monsieur Ferdinand, comme l’appelaient les chamoniards, est ambitieux, il organise au départ de Genève des convois spéciaux pour acheminer les provisions indispensables à son hôtel, et fait du « lobbying » auprès de visiteurs arrivant à Genève pour les convaincre de loger dans son hôtel à Chamonix. En 1848 il construit un nouvel hôtel le Royal (aujourd’hui le casino).

En 1860 lors du voyage Napoléon III le maréchal des Logis cherche le meilleur établissement pouvant recevoir l’empereur et sa cour. Son choix se porte sur ce nouvel hôtel. Le ministère est effaré par les tarifs proposés mais Mr EisenKrammer n’en démord pas si bien que l’empereur ne résidera qu’une seule nuit à Chamonix malgré le désir de l’impératrice!

Les deux hôtels sont proposés sous le nom Hôtel Royal et de l’Union.  Mr Ferdinand a quelques démêlées avec les guides en raison de son refus de passer par le bureau de la Compagnie pour proposer les guides de son choix sans passer par le tour de  rôle.

Mais l’hôtel connaît toujours un réel succès. Théophile Gauthier en 1862 l’apprécie particulièrement  : «  l’hôtel de l’Union est grand et magnifique, tenu à la manière des hôtels d’Allemagne de première classe avec toutes les recherches du confortable moderne. On nous y servit dans une salle immense un excellent déjeuner ». Il envisage de créer une grande station thermale mais il peine à convaincre la commune. Il crée dans les années 1862 une société intitulée « les hôtels de Chamonix » société qui rassemble plusieurs hôtels de Chamonix mais celle-ci ne s’impose pas  et  finalement est   rachetée par deux banquiers .

Dès lors Mr Eisenkrammer disparait et l’hôtel passe de main en main. On voit ainsi un grand nombre de propriétaires se succéder d’où des appellations différentes pour l’hôtel jusque en 1897 ou Mr Felisaz le rachète.  Il entreprend des travaux d’agrandissement, crée un restaurant dans les jardins dont la façade est ornée de cariatides.  L’hôtel reconnait de belles heures d’activité.

A la mort de Mr Félisaz les héritiers peinent à faire fonctionner l’hôtel.

En 1929 la commune désirant ouvrir une belle place au centre de Chamonix finit par exproprier les propriétaires.

 L’hôtel est détruit en 1930 laissant place à la construction de l’hôtel des Postes en bordure d’Arve et ouvrant ainsi une place plus aérée en centre-ville.

Sources :

Archives association des Amis du Vieux Chamonix – Thèse : Isabelle Madesclaire- Voyages de deux amis en Italie par le Midi de la France et retour par la Suisse de Richard et Achille Lheureux en 1829. – L.Simond, Voyage En Suisse. – CH Vallot : guide de Chamonix – André Hélard : John Ruskin et les cathédrales de la terre.- Christine Boymond Lasserre et Joëlle Dartigue Paccalet : 1860 . La vallée de Chamonix et l’Annexion. – Marc Sandoz : Auberges d’autrefois. Revue savoisienne – Rodolphe Topffer : voyage autour du mont Blanc – Paul Payot : Au royaume du mont Blanc

Sources :

Thèse : isabelle Madesclaire

Voyages de deux amis en Italie par le Midi de la France et retour par la Suisse de Richard et Achille Lheureux en 1829.

L.Simond, Voyage En Suisse

CH Vallot : guide de Chamonix

André Hélard : John Ruskin et les cathédrales de la terre.

Christine Boymond Lasserre et Joëlle Dartigue Paccalet : 1860 . La vallée de Chamonix et l’Annexion.

Mar Sandoz : Auberges d’autrefois. Revue savoisienne

Rodolphe Topffer : voyage autour du mont Blanc

Paul Payot : royaume du mont Blanc

La gare SNCF de Chamonix

Accéder à la vallée n’était pas aisé, le moyen le plus courant étant le mulet ou la marche à pied.  Les touristes empruntent régulièrement un attelage rudimentaire, le char à bancs, simple voiture hippomobile ouverte. Au XVIIIe siècle, il faut bien souvent trois jours pour se rendre de Genève à Chamonix.

Lors de son voyage de découverte de la Savoie (devenue nouvelle province française en 1860), l’Empereur Napoléon III offre une somme d’argent pour la construction d’une voie carrossable Cette route arrive définitivement dans la vallée en 1867 et, à Chamonix, en 1870. Aussitôt sont mis en place des services de diligences.

Le XIXe siècle voit l’explosion des chemins de fer dans toute l’Europe. Le train arrive au Fayet en 1898.Pour accéder ensuite à Chamonix, on opte pour une voie métrique électrique. C’est la première voie ferrée à traction électrique construite en France.

La ligne est attribuée à la compagnie PLM.

Le train atteint Chamonix le 25 juillet 1901. La ligne multiplie par dix la fréquentation touristique au tournant du XXe siècle. Il transporte 420 voyageurs par jour et connaît immédiatement un immense succès. La ligne multiplie par dix la fréquentation touristique au tournant du XXème siècle. La ligne est prolongée en 1906 sur Argentière et 1908 sur Vallorcine. Mais le train ne fonctionne qu’en été . En raison des avalanches nombreuses sur l’itinéraire il faut sécuriser la ligne. Des galeries paravanalches sont construites. Ce n’est que dans les années 1930 que les trains peuvent enfin circuler en hiver jusqu’à Montroc.

La petite gare de Chamonix construite en 1901 subit, dès 1909, un agrandissement de part et d’autre de la partie centrale mais elle est jugée trop « dépouillée »  par le ministre des Travaux Publics. Sont alors  ajoutés, en 1912, des  lucarnes à deux pans   sur les longues toitures des ailes latérales et sur le pavillon central.

Il y a cent ans le MAJESTIC ouvrait officiellement ses portes


En période de Belle Epoque (1885-1914), Chamonix connaît un développement fulgurant. La famille Cachat, propriétaire de l’Hôtel Mont-Blanc, se lance dans la construction d’un palace.

Elle possède des terrains remarquablement bien situés au pied des pentes du Brévent. L’avenir touristique est prometteur et le projet est grandiose. On fait appel à Alexandre Bordigoni, architecte suisse. Dès 1911 les travaux sont engagés. Un immense  palace voit le jour. 300 chambres dont 200 avec salles de bains. Il trône au milieu de jardins somptueux. Des tennis sont aménagés en contre bas afin d’ assurer à la clientèle une animation estivale.

Pour ce faire, la famille fait un très gros emprunt auprès du Comptoir Suisse. Hélas, la guerre est déclarée en septembre 1914. C’est la chute du tourisme, le personnel est manquant, le palace vivote. Après guerre, la vie reprend peu à peu. On inaugure officiellement le palace durant l’été 1919. Les voyageurs reviennent dans la vallée. Le palace connaît même en ces années folles une vie éblouissante de fêtes mondaines, galas, bals masqués, concerts en tous genres pour satisfaire une clientèle internationale bien souvent exigeante et excentrique. Animation qui cache cependant une gestion difficile pour la famille. Le coût de l’emprunt lancé avant guerre a quintuplé, la famille, prise à la gorge, se voit dans l’obligation de confier la gestion du palace à la banque ! L’arrivée de la seconde guerre mondiale est évidemment catastrophique, les touristes sont peu nombreux.


A partir de 1943, le palace est réquisitionné pour servir d’hôpital aux officiers allemands, puis en 1944 aux officiers américains. Après la guerre, la vie reprend peu à peu, le palace cependant ne retrouve pas cette clientèle riche et aisée des périodes fastes. Bien que le sultan du Maroc ou l’Agha Khan viennent régulièrement avec leur cour, le Majestic peine à entretenir ce prestigieux palace où plus de 200 personnes, dont 80 cuisiniers, sont nécessaires pour le faire vivre ! Chaque cuisinier dirige une brigade (environ 7-8 personnes) pour chaque spécialité (viandes, poissons, entrées). Sans compter un chef saucier, un chef grillades, et deux chefs pâtissiers (gâteaux et entremets). Plus toute une équipe de plongeurs : un pour les casseroles en cuivre, un pour les autres casseroles, un pour les couverts en vermeil, un pour les simples couverts, un pour les verres en cristal, etc … Sans oublier, à l’hôtel, plus d’une centaine de personnes, femmes de chambres, hommes de main, chapeauté par un directeur, aidé d’ un chef de réception et concierges secondés par une multitude de sous mains, comme coursiers, porteurs, jardiniers. Et des gendarmes à la retraite afin de surveiller les nombreux couloirs et salons du palace, mais également le personnel à la sortie de leur travail!


Cette abondance de personnel, usage d’une autre époque, coûte cher. Les années 1950-1960 marquent le déclin de cette hôtellerie de prestige. Est alors décidée la transformation du palace en habitations. Victor Saglia, architecte spécialiste de ce type de travaux, s’engage dans ce projet ambitieux. Les suites et chambres sont transformées en appartements et bureaux. La commune achète les trois quarts du rez de chaussée en 1961 pour accueillir l’organisation des courses des championnats du monde de ski de 1962.


Le palace connaît alors une nouvelle vie grâce à son rez de chaussée préservé dans son décor d’origine.

Merci à Pierre Osterberger pour les souvenirs de son apprentissage dans les cuisines du Majestic qu’il m’a gentiment transmis.

1836 : De drôles d’hôtes à l’hôtel de l’Union à Chamonix

En septembre 1836 : le propriétaire du très fameux hôtel de l’Union à Chamonix voit débarquer de drôles de personnages…

« Un soir, un jeune homme mal vêtu, couvert de boue, à la blouse étriquée et à la chevelure désordonnée, accompagné  de deux enfants et d’une servante, demande à l’aubergiste s’il avait, parmi ses pensionnaires,  un personnage, avec un large chapeau, une cravate roulée en corde et fredonnant en permanence une rengaine le « Dies Irae ! », ainsi qu’une belle jeune femme. Bien sûr, lui répond l’aubergiste. Ils viennent d’arriver ! Ils sont au numéro 13. Tout ce petit monde se retrouve dans une grande gaîté, ameutant les voisins irrités par le bruit.  Oh ! Compte tenu de leurs  vêtements farfelus, indéfinissables et par ailleurs chevelus comme des sauvages, ce ne pouvait être qu’une troupe de comédiens ! Le chef de cuisine les prend pour des saltimbanques, et en office on compte et recompte l’argenterie.

Le lendemain, un major de l’artillerie se présente et demande après ce groupe. L’hôtelier est persuadé que celui ci vient les arrêter. Ils sont si bruyants !

Mais pas du tout, il se précipite vers la chambre numéro 13 et c’est de nouveau un tapage incroyable, des cris de joie, des hurlements ! Oh scandale ! La bonne clientèle britannique n’apprécie guère cette troupe bruyante ! Ainsi, deux jeunes douairières ce soir là barricadèrent leur porte craignant, on ne sait, une invasion de leurs chambres !

Mais qui sont donc ces personnages excentriques ?

Notre jeune homme à la blouse étriquée et à la chevelure en bataille n’est autre que Georges Sand venue retrouver ici à Chamonix Franz Liszt et sa belle et douce amante, la fameuse comtesse d’Agoult : Georges Sand venue avec ses 2 enfants, mais habillée en homme, tenait à revoir ce que la bonne société parisienne décrivait avec emphase : Chamonix. Le dernier venu, le militaire, n’est autre que le major Pictet arrivé de Genève pour se joindre à cette équipe pas banale !

Le lendemain aux aurores Franz Liszt s’époumone à réveiller tout ce petit monde afin de se rendre à la fameuse Mer de glace. La caravane ne passe pas inaperçue, tout particulièrement Georges Sand osant porter un pantalon et une chemise d’homme et fumant cigare sur cigare. Franz Liszt, habillé style renaissance, avec un béret du genre « Raphaël » à l’image du peintre italien et Pictet en uniforme militaire ; on imagine l’équipée !

Au Montenvers, Georges Sand montre assez peu d’enthousiasme, contrairement à ses compagnons s’émerveillant « des magnificences de la mer de glace »,  « .. des éclatantes aiguilles, des glaciers et de l’immense chaos de la mer de glace où les nuages jouent avec les aiguilles dominant la vallée glaciaire ».  Elle résistait à l’entrain de sa troupe, elle cueille une petite clochette bleue et déclare

« J’aime mieux cette campanule que toute votre Mer de glace » mais, attentive aux pierres, elle achète un cristal de roche. Mais il est vrai que la présence d’autres touristes l’importune. Lors de son voyage précédent, en 1834,  son compagnon Pietro Pagello note la longue caravane d‘anglais de français d’allemands et d’américains qui l’agaçait déjà ! Probablement ne supporte-t-elle pas cette proximité avec ces touristes étrangers !

Elle se rend également au glacier des Bossons, et note une scène peu connue de la vie rurale chamoniarde : dans la soirée, elle remarque qu’un roulement de tambour annonce aux habitants qu’ils doivent allumer des feux dans les champs afin de les protéger de la gelée qui s’annonce.

Elle admire cependant les «… monts neigeux, étincelants aux premiers rayons du soleil »

Le soir de leur excursion, un plantureux repas les attend à la table d’hôte de l’hôtel. La bande joyeuse est  mêlée à la clientèle anglaise que George Sand apprécie assez peu, elle la considère comme snob et prétentieuse !

Le lendemain, il pleuvait de nouveau. Pour passer le temps, on se mit à philosopher, puis le ciel s’éclaircissant, la petite équipe se mit en route repartant en direction de Martigny. L’aubergiste de l’hôtel de l’Union poussa un grand soulagement, se réjouissant de voir partir cette bande d’hôtes dont il se méfiait tant. La légende dit qu’il envoya aussitôt chercher Monsieur le curé pour exorciser, en les aspergeant d’eau bénite, les chambres qu’ils avaient occupées.

Georges Sand ne reviendra pas à Chamonix

Source : Annuaire du club alpin français: article de Julien Bregeault – Les quatre montagnes de Georges Sand de Colette Coisnier.

un patinoire hors norme lors des Jeux olympiques de 1924

Il y a 95 ans se déroulait  la semaine internationale des sports d’hiver de Chamonix  à l’occasion des  VIIIe olympiades organisées à Paris.

La plus belle et la plus grande patinoire d’Europe va être construite à Chamonix .

Une patinoire de plus de 36 000 m2 fut imaginée pouvant contenir deux surfaces de hockey , deux surfaces libres pour les figures , un anneau de vitesse de 400 mètres et une piste de curling . Projet très ambitieux pour Chamonix.l

le magnifique plan de cette patinoire appartient à l’association des Amis du Vieux Chamonix.

Pour la commune de l’époque réaliser une telle patinoire ne fut pas une sinécure ! On choisit la rive gauche de l’Arve ,  lieu dit des « mouilles » . Drainer, creuser, renforcer les berges de l’Arve  ne fut pas simple et comment soutenir le terrain ? On travailla de jour et de nuit   à la pioche. A l’aide de petits wagonnets on achemina du bois du Bouchet tout proche les remblais nécessaires. La municipalité de Chamonix , conduite par un maire actif Jean Lavaivre, contracte un emprunt de 300 000 francs auprès des particuliers propriétaires des palaces et des grands hôtels de la commune, ainsi qu’un emprunt  supplémentaire de 500 000 francs auprès des banques.

Il y un mois de retard…Tant le terrain était difficile. Livraison fin décembre. OUF .

Un hiver rigoureux s’annonçait et on fit appel à Benoît Couttet et Jean Claret pour gérer la fabrication de la glace. Trente hommes en permanence étaient à disposition, On arrosait de nuit à la lance, le froid faisait le reste. La patinoire fut dotée d’une glace parfaitement lisse et dure.

Fin décembre d’énormes chutes de neige tombèrent sur Chamonix ! On recruta plus de 600 hommes pour déblayer les 1.70m de neige tombés en une nuit ,sans matériel particulier, seulement la force de l’homme ! On besogna toutes les fêtes de fin d’année et une bonne partie du mois de janvier. Nombre de bénévoles chamoniards participèrent à ce travail gigantesque. Puis à quelques jours de l’ouverture…le foehn…immense dégel. C’est la catastrophe…Benoît Couttet et ses hommes  réalisèrent un travail incroyable pour conserver la glace, la maintenir, et éviter que tout disparaisse « à l’Arve » ! Puis le « miracle »… le gel de retour. Jours et nuits ils  trimèrent inlassablement afin de lisser, nettoyer et faire de cette patinoire la plus belle et la plus imposante jamais vue encore dans cette Europe des années folles.

Le 24 janvier 1924, il gèle à pierre fendre sur Chamonix.

Un soleil radieux illumine la vallée, lorsque Gaston Vidal, Sous-Secrétaire d’Etat, prononce solennellement les paroles sacramentelles : « Je proclame l’ouverture des Jeux d’Hiver de Chamonix données à l’occasion de la VIIIe Olympiade »

Ce sera le vrai début des sports d’hiver dans la vallée de Chamonix.

Sources : Archives association Amis du Vieux Chamonix – Musés Jeux Olympiques Lausanne –  Revue « sports d’hiver » années 1924.

Chapelle anglaise ou temple protestant ?

Elle appartient à l’Eglise Réformée de France mais certains chamoniards continuent à l’appeler la chapelle anglaise !

Nul n’ignore l’importance de la communauté britannique à Chamonix. Elle remonte au XVIIIe lorsque les premiers visiteurs dans la vallée de Chamonix se révèlent être des anglais.

Par la suite et au cours du siècle suivant, ils marqueront à jamais l’histoire de la vallée. Touristes, scientifiques, alpinistes anglais créeront des liens toujours forts avec les chamoniards.

En ce milieu du XIXe, il manquait aux britanniques, de rite anglican, un lieu pour exercer leur culte. Ce sont les hôteliers chamoniards qui ouvraient chaque dimanche  leurs salles à manger afin d’assurer le service anglican pour leurs clients. Bien vite, ces salles sont devenues trop petites. C’est alors que « la Société de l’église coloniale et continentale de Londres » demande à la préfecture l’autorisation de construire une chapelle. L’accord est donné, mais on les prie de construire au-delà du centre du village. La société acquiert ainsi de  la famille de Mr Desailloud, propriétaire du café de la Fidélité à Chamonix, un terrain pour y bâtir un temple.

La chapelle est construite dès 1859, et inaugurée en 1860. Loin du centre, elle trône, magnifique,  au milieu des prés. D’un côté l’on voyait la chute du glacier des Bossons de l’autre celle de la Mer de glace. Pendant ces années de Belle Epoque,  des chapelains assuraient les services religieux. Ils consignaient  sur un registre tenu à cet effet le nombre des fidèles, les difficultés climatiques, les dépenses effectuées, les personnages importants de passage, le nombre de services. Ceux-ci ne venaient cependant que durant l’été. L’hiver aucun service n’était assuré.

A l’origine le chœur devait, comme toute église anglicane, être orné de vitraux. Seul un a été réalisé, le coût trop élevé et l’arrivée de la guerre ont définitivement arrêté le projet.

Mais lorsqu’il fallait enterrer les quelques anglais décédant dans la vallée, ceux-ci devaient être inhumés dans le cimetière catholique. Et le curé de l’époque manifestait sa désapprobation en ne leur laissant des places qu’hors de l’enclos autorisé.

Ce sont les hôteliers chamoniards ainsi que Venance Payot, maire de Chamonix à l’époque, qui insisteront auprès de la préfecture pour que la petite chapelle anglicane puisse abriter son propre cimetière. En 1871, la communauté anglaise obtient l’autorisation d’y inhumer ses morts. Avec le temps, une vingtaine de britanniques seront enterrés à proximité immédiate de la chapelle.

La première guerre mondiale apporte un changement notoire. Les anglais ne sont plus aussi nombreux à venir à Chamonix. Et peu à peu la chapelle sera utilisée par l’Eglise Réformée de France, bien que les murs soient encore la propriété de « la Société de l’Eglise Coloniale et Continentale de Londres ». Le cimetière accueille alors les inhumations des familles protestantes de Chamonix.

Lors de la loi imposant de mettre les cimetières à l’extérieur des centres villes, la municipalité recevra une lettre de la société demandant expressément que l’on conserve ce petit cimetière à son emplacement afin de conserver la mémoire de ces britanniques qui avaient participé à l’enrichissement de Chamonix ! La commune obtempéra, d’autant que le cimetière était privé.

L’histoire cependant continuera avec les Misses anglaises. Bien qu’anglicanes, elles entretiendront durant la période de l’entre deux guerres l’entretien du temple soutenant le pasteur Chaptal  qui assuraient les services  religieux à la grande satisfaction des protestants de la commune. Et lors de la sombre période de l’occupation de la seconde guerre mondiale, les fameuses Misses participeront d’une manière très active à l’engagement de la résistance. Elles étaient très aimées des chamoniards.

La chapelle anglaise, devenue temple protestant, est cédée en 1970 puis vendue pour un franc symbolique le 29 juillet 1981 à l’Eglise Réformée de France. Cependant, les anglais, de nouveau nombreux à Chamonix, reconnaissent  le temple comme leur chapelle en raison de son histoire plus que centenaire et de l’esprit commun protestant les liants à l’église réformée et bien souvent on peut assister à un mariage anglican assuré par le pasteur de la paroisse du Mont Blanc.

Sources : archives départementales – Eglise réformée de France –

Je m’appelle « Escalade »

Me connaissez-vous?
Vous êtes-vous arrêtés près de moi?
M’avez-vous bien regardée?
Je suis pourtant là, tout près de la Maison de la Montagne.

Je vois défiler du monde, beaucoup de monde…

Mais combien s’arrêtent devant moi?
Savez-vous qui je suis et pourquoi je suis là?

J’ai été réalisée par Gilles Vitaloni, sculpteur diplômé des Beaux Arts de Carrare, sorti de l’école d’art Pietra Santa. Ce n’est pas rien! Il adore travailler le marbre, cette matière si exigeante, si délicate à sculpter.

En 1992, il participe à un tour de France de la sculpture dans le cadre des J.O. d’Albertville et réalise des œuvres d’art en public, Chamonix sera une de ses étapes.
Peut être certains se souviennent-ils de Gilles travaillant devant le foyer de ski de fond de l’époque!
Parce qu’il est à Chamonix, c’est sur un bloc de granit, que Gilles travaille à son œuvre. Certes, la pierre ne provient pas de la vallée mais du Tarn où sont encore exploitées dans les années 1990 des carrières de ce matériau si dur à façonner.
Gilles travaille en public, il aime échanger avec les promeneurs. Il veut que chacun participe à son œuvre. Il s’inspire des remarques faites par les flâneurs.
Il me donne mon nom: Escalade. Oui, car ici dans cette vallée l’alpinisme se confronte à ce granit, si robuste, si compact et si puissant.
Regardez-moi. Admirez les 4 faces de mon bloc !

Je suis à l’image de l’esprit rude du montagnard.
Je suis là, ancrée dans ce paysage, près de cette maison qui voit défiler tant de guides connus ou pas, et dont l’activité, l’escalade, est le cœur de leur vie.
A mon pied le nom de Chamonix est gravé car je devais partir représenter la station ailleurs!
Le choix de mon sculpteur était «ESCALADE»
Finalement je suis restée ici. Gilles a eu la modestie de ne pas graver son nom.
Dommage ! , ne mériterait-il pas d’avoir son nom gravé à mon pied?

L’histoire du SAVOY Hôtel devenu Folie Douce en 2018

L’hôtel le  Savoy était occupé depuis 1963 par le CIT puis en 1970 par le  Club Méditerranée. Cette année il va vers un nouveau destin. Mais connaissez vous son histoire ?

Photo collection Gay Couttet

Elle s’appelle Sarah, est la quatrième de la fratrie de 5 enfants de la famille François Couttet dit « Baguette ». Elle a 16 ans à la mort de son père, 18 à la mort de sa mère.  Élevée dans la pure tradition hôtelière depuis sa petite  enfance, elle seconde sa sœur aînée Aline  pour gérer l’hôtel familial du Grand Hôtel Couttet, jusqu’à la majorité de ses frères Jules  et Joseph.

En 1899 à l’âge de 26 ans elle se marie avec Adolphe Tairraz le frère du grand photographe Georges Tairraz. Dans la succession elle hérite d’un beau terrain au pied du Brévent. Et c’est là qu’en 1901 elle lance avec l’aide d’un emprunt auprès d’une banque suisse la construction d’un hôtel de luxe. Elle l’appelle le Savoy Hôtel, nom choisi en raison du célèbre « Savoy Hôtel » de Londres connu par toute la clientèle internationale. C’est le cabinet d’architecture genevois De Morsier et Weibel qui construit cet élégant hôtel à l’image des palaces européens. Celui-ci connait immédiatement un vif succès. C’est le premier hôtel à posséder l’eau courante dans toutes les chambres dont les suites possèdent des salles de bain. Un ascenseur est installé

en 1903 et un orchestre joue tous les soirs dans la grande et magnifique salle à manger de l’hôtel.

Adolphe meurt  en 1906 la laissant seule avec 2 enfants Armand et Germaine. Elle a 33 ans. Seule, elle gère avec brio l’hôtel. En pleine Belle Epoque le Savoy Hôtel connait un réel succès. On y voit la reine d’Italie, son altesse impériale et royale Otto de Habsbourg, la belle actrice Rose Caron ou le milliardaire américain Pierpont Morgan et même le légendaire Buffalo Bill en 1907 !  Elle s’engage alors dans le projet d’un agrandissement. Sous la conduite d’un autre cabinet d’architecture genevois c’est Joseph Guglielmetti entrepreneur ambitieux qui le réalise.  Ce sera la magnifique aile couronnée d’un toit pyramidal et sur lequel elle fait sculpter une croix de  Savoie de chaque côté du balcon supérieur. Dans la même année elle inaugure cette aile particulière et  épouse l’entrepreneur le 7 juillet 1911 avec qui elle aura 4 enfants.

 Publicité été avec les tennis années 1935 Collection Bernadette Tsuda

L’hôtel prend le nom de Savoy Palace.

Il connait alors ses heures de gloire jusqu’à l’entrée en guerre de la première guerre mondiale. Les années d’après guerre appelées les « années folles » voient arriver au palace une clientèle excentrique, riche.Les journaux locaux se font l’écho de ces fêtes somptueuses se déroulant au Savoy palace : « orchestres, danse, bals masqués,  fêtes mondaines et galas, compétitions de tennis » sont les publicités de l’époque. Avec l’arrivée de la seconde guerre mondiale son fils Armand Tairraz prend la relève et gère le palace un temps avec son demi frère Charles Guglielmetti.

En 1945-1946 l’architecte Henri Jacques le Même aménage la terrasse supérieure. L’hôtel reprend en 1947 son nom d’origine « Savoy Hotel » perdant sa qualité de palace, Armand ayant beaucoup de peine à maintenir à flot cet ancien hôtel de luxe. Les travaux de modernisation sont trop coûteux et de plus il ne s’entend guère avec son demi frère et les frais liés à l’indivision sont  particulièrement élevés pour Armand.

Le glorieux établissement sera finalement acheté en 1960 par le baron Elie de Rotschild, très vite il se rend compte qu’il perd chaque année 50 millions de francs. Confié à un fond de pension l’hôtel est  loué au CET ( (club européen du Tourisme) en 1963 . Ce CET Absorbé par le Club Méditerranée  le Savoy deviendra en 1970 un de ses fleurons.

Depuis de nombreux travaux ont été réalisés. Mais quasiment tout du décor original disparaît dans des travaux de modernisation. Fort dommage car on aurait pu, à l’image du Majestic, garder et rénover au moins l’ensemble des salons et salle à manger ! Même l’escalier principal a disparu !

Le Savoy Hôtel n’est plus occupé par le Club Méditerranée. Propriété d’un fond de pensions il est à ce jour loué à un nouveau groupe hôtelier appelé Folie Douce.

L’ensemble du rez de chaussée a été entièrement détruit pour ne faire qu’un seul et unique espace .   Plus rien n’existe du palace d’antan , ici les murs sont bruts de décoffrage! Le décor est surprenant ! parfois intrigant. En tout cas très décalé. Certains peuvent aimer !

La façade principale est , de nuit, éclairée par une lumière passant du bleu au rose…à l’image des maisons closes des années 1900 !

L’entrée ouvre sur un bar monumental, de là un escalier conduit dans une fosse où musique ,  danseurs , clients se mêlent dans une rumeur houleuse et bruyante. Trois restaurants aux thème différents se trouvent sur le même niveau. 250 chambres aux tarifs variés du très cher au bon marché, 220 personnes y travaillent….

Le temps passe, que restera t’il de cet ancien palace fleuron de l’architecture chamoniarde .

Les deux Croix de Savoie ornant le balcon supérieur de l’aile construite en 1911 et la très belle ferronnerie typique Art Nouveau

L’hôtel Fin Bec ou l’hôtel Lutetia ?

En juin 1888, la préfecture de Haute Savoie autorise Auguste Alfred Couttet, voiturier et guide , à « …construire une maison sur le côté droit de la Route Nationale ». Décédé dix ans après, c’est sa fille Augusta Ernestine qui, héritant d’un quart de la maison construite par son père , rachète le reste à son frère. Avec son mari Jean César Couvert ils créent en 1902 l’hôtel «  Fin Bec et des Fonctionnaires ». Il abrite 20 chambres. Ce petit hôtel propose une cuisine dite « bourgeoise »

Et oui ! On ne s’appelle pas hôtel « Fin Bec » pour rien ! Et la qualité d’un restaurant fait la renommée du lieu ! La publicité précise qu’il y a de l’électricité, une chambre noire, le chauffage central et des bains. Certes, nous ignorons si les bains étaient dans toutes les chambres, probablement pas. L’habitude à l’époque était d’avoir une salle de bains à l’étage. Mais la précision de l’électricité, qui n’était pas toujours généralisée dans Chamonix, et l’installation du chauffage central nous montrent le désir de la part du propriétaire de proposer un hôtel confortable et chaleureux ! Il est intéressant aussi de noter la remarque sur une « chambre noire ». En fait, déjà à cette époque, les appareils de photographie s’étaient miniaturisés et les clients aisés possédaient leurs propres appareils. Avec une chambre noire, ils pouvaient procéder à la technique du développement de leurs photos. Un argument de poids pour le client passionné. Et afin de rassurer la clientèle potentielle, on précise bien que le propriétaire, Jean César Couvert, est ancien chef de brigade de gendarmerie. Pour rassurer la clientèle ? Pour inviter les fonctionnaires à se rendre dans cet hôtel là plutôt qu’un autre ? Probablement les deux !

En 1908, l’hôtel prend le nom d’Hôtel-restaurant du Fin Bec, officiellement tenu par Couvert-Couttet. Il perd son appellation des fonctionnaires.
Manifestement, l’hôtel fonctionne car bien répertorié par le Touring Club, référence importante de l’époque. A partir de 1927, l’hôtel est mentionné comme Hôtel Fin Bec et Lutetia. Pourquoi ce nom ? Est-ce en rapport avec le Lutetia du boulevard Raspail à Paris. Peut être !

Il est vrai que la famille entreprend d’agrandir l’hôtel. En 1929 on le surélève de 3 étages. Il est tenu par l’ensemble de la famille « Couvert-Couttet et fils ». Il y a alors 52 chambres, presque toutes face au Mont Blanc et au 1er étage sont créées deux appartements avec cuisine, nouveauté à l’époque. Le dernier étage , sert de séchoir à linge les jours de mauvais temps mais aussi de réservoir à eau. Ce Lutetia a un petit air d’hôtel parisien avec son toit à la Mansart !

Mais la guerre arrivant, l’hôtel, comme nombre d’hôtels à Chamonix, ferme. En 1939 il est réquisitionné un temps par l’armée française pendant la période 1939-1940. Il est bien difficile de le rentabiliser avec la menace de la guerre, la clientèle est rare. L’hôtel finalement ferme. De plus, en 1942 meurt Jean César Couvert. L’immeuble est alors divisé et vendu en appartements.

Un des héritiers, Martial Couvert (fils d’Ernestine), rachète le rez de chaussée afin de continuer d’exploiter avec sa femme Alice un restaurant brasserie qui, toujours appelé le Fin Bec, puis finalement le Lutetia, connait une belle réputation. Martial avait fait l’école hôtelière Lesdiguères de Grenoble et la réputation du restaurant n’était pas usurpée. Un beau livre d’or rappelle le souvenir du passage de Maurice Baquet, Jean Constantin, Lionel Terray, la patineuse Jacqueline Vaudecrane, l’actrice Ann Todd ou encore l’acteur Jean Tissier ou le réalisateur David Lean.

A ce jour le Lutetia trône ainsi face au Richemond au cœur de la rue Michel Gabriel Paccard et nous rappelle ainsi les temps ou un chamoniard (Alfred Auguste Couttet), voiturier en contact avec une belle clientèle, entreprend de se lancer dans l’hôtellerie et dont les enfants sauront se mettre au goût du jour. Une belle histoire locale !

 

Merci aux membres de la famille Couvert qui ont bien voulu m’ouvrir leurs archives .

A Chamonix, qu’est-ce que  le Pont de Cour ?

  Traverser l’Arve autrefois  a été une problématique majeure pour nos anciens. Avant d’accéder dans la vallée de Chamonix on  franchissait le torrent à Servoz par le fameux pont Pélissier, régulièrement emporté par des eaux dévastatrices, puis  le chemin restait sur la rive gauche.  Avant d’arriver au bourg de Chamonix on retraversait l’Arve  aux Bossons par le pont de Pierralotaz.

Au cœur de Chamonix,  il existait  un seul et  unique passage pour passer sur l’autre rive : le fameux pont de Cour.

Aujourd’hui, nous avons un grand et large pont de pierres situé entre la poste et le bar de la Terrasse. Ce lieu s’appelle, depuis le Moyen Age, le Pont de Cour.

On le trouve parfois orthographié Cour, Court ou encore Couz.

Court ou Cour   provient du bas latin curtis,  c’est-à-dire « cour de ferme » ou « enclos comprenant maison et jardin, tenure ». Ce qui serait assez logique puisque  les prieurs  possédaient en bordure d’Arve une grange,  deux moulins,  un  battoir,  justifiant ainsi  le nom de notre pont. Mais alors pourquoi dans certains documents trouve-t-on parfois Couz? Couz dans les Alpes signifie un col. Ici ? Un col ?  Peut être un lieu ou les berges se resserrent? En tous cas certainement un lieu où il était relativement aisé de traverser grâce  à  une passerelle. En 1435, à la lecture des actes signés entre les prieurs et les communiers, on apprend que les riverains ont l’obligation d’entretenir les routes et les ponts, mais on ne relève rien de précis concernant notre pont au cœur de Chamonix.

 Ce Pont de Cour fut en 1635  l’objet d’une transaction entre la communauté de Chamonix et le chapitre de la collégiale de Sallanches. Il est précisé que « la communauté de Chamonix sera tenue à perpétuité de rendre accessible le Pont de Cour avec une largeur suffisante pour y passer les chariots, à la charge néanmoins que les seigneurs du Chapitre seront tenus de faire le port de tout le bois et qu’ils seront tenus de le couper dans la dimerie de l’église du lieu »

Ainsi, un seul pont de bois donnait accès à la rive gauche, régulièrement emporté par les débordements  de l’Arve. Cette petite passerelle  n’était pas plus large d’un mètre. Mais toujours  elle fut reconstruite au même endroit. Paul Payot,   dans son livre « Au royaume du Mont Blanc », nous apprend que le 18 septembre 1801 le pont de Cour est tombé avec sept vaches appartenant au frère Désailloud…  Les vaches n’ont pas eu de mal, heureusement !

L’Arve, rivière indisciplinée au cours changeant,  avait pour habitude de déborder de ses berges, pour preuve certaines photos du 19ème siècle qui nous montrent l’Arve et l’Arveyron,  ainsi que les torrents de Blaitière,   s’étalant largement au-delà de leurs rives gauches.

Il faudra attendre les années 1840, sous le régime du royaume de Piémont Sardaigne, pour que certains travaux d’endiguement soient engagés. C’est d’ailleurs durant cette période que l’on voit la construction en encorbellement de l’hôtel d’Angleterre ou de la pension de la Terrasse. Les travaux   de canalisation  reprendront sous le régime français dans les années 1870-1880.

Il est instructif de regarder les diverses vues, tableaux, lithographies représentant ce pont de bois. Tout d’abord passerelle étroite peu engageante, on la voit se transformer, devenir de plus en plus large. Le pont sera refait à neuf en 1832,  puis construit en pierre en 1880, et encore élargi à son emprise actuelle dans les années 1970.

Le pont sera refait à neuf en 1832, puis construit en pierre en 1880, et encore élargi à son emprise actuelle dans les années 197

Comment dans les temps anciens voyageait- on pour arriver à Chamonix ?

L’accès à Chamonix fut toujours difficile.

Au XIXème siècle, si l’on arrivait relativement facilement à Sallanches en diligence ,  accéder à la vallée était bien souvent une aventure. En raison du chemin accidenté, traversant nants et torrents, nul véhicule ne pouvait  impunément rouler sur ces chemins trop raides, trop périlleux.

Tableau Eugène Guérard. "la poste de Sallanches à Chamonix" année 1850 - Copyright RMN (Réunion des musées nationaux)
Tableau Eugène Guérard. « La malle poste de Sallanches à Chamonix  » 1850 -Copyright RMN (Réunion des musées nationaux)

Le moyen le plus courant était bien sûr le mulet ou la marche à pied.  Mais parfois les touristes empruntaient un  attelage des plus rudimentaires : le char à bancs, sorte de voiture hippomobile ouverte, à quatre roues, munis de bancs disposés parallèlement aux essieux…pas vraiment confortables !  Et lorsque la pente était trop raide ou trop glissante le voyageur était  prié de descendre du véhicule. On démontait le  char  que l’on remontait ensuite quelques centaines de mètres plus loin.  

Lors de son voyage vers les glacières de Chamonix   l’empereur Napoléon III,   effrayé par cet itinéraire éprouvant, offrit une somme d’argent pour  la construction d’une route carrossable  plus large, plus grande et moins dangereuse.

Ce qui fut fait. La route arriva définitivement à  Chamonix en 1870.

A partir de cette date très rapidement, les diligences arrivèrent directement de Genève  à Chamonix. Tout d’abord une  par semaine, puis une par jour voire deux ou plus. Elles  quittaient Genève à 8h du matin et arrivaient à Chamonix vers 16h.

Il  existait plusieurs modèles de diligences, plus ou moins grandes en fonction du nombre de voyageurs.  D’une manière générale, les voitures étaient divisées en 3 compartiments comportant à l’avant un siège couvert appelé « coupé » comprenant  trois sièges plus celui du cocher,  au centre à l’intérieur une partie appelée  « berline »  pouvant contenir 6 ou 8 personnes, ,  parfois une autre berline située au dessous de cette  première,  à l’arrière un siège appelé « rotonde » pour 3 personnes (mais peu apprécié des voyageurs). Parfois sur le toit se trouvait une banquette appelée impériale. Les tarifs évidement étaient variables en fonction de l’emplacement du siège dans le véhicule. Les bagages souvent encombrants  se trouvaient soit en haut, soit dans des coffres à l’avant ou à l’arrière du véhicule. Pour accéder à l’intérieur de la diligence  on avait besoin d’une échelle. Il existait parfois des marchepieds portefeuilles. La partie intérieure de la berline était recherchée car plus confortable… Mais plus chère aussi. Elle était habituellement agrémentée de larges banquettes ou coussins rembourrés  de crin animal ou végétal. Il existait aussi un coussin particulier de forme allongée et très souple appelé rouleau  de voyage qui servait à caler les épaules et le cou… On imagine bien volontiers les secousses. On devait arriver exténués !

A l’arrivée une cohorte de concierges des divers hôtels de la vallée attendaient le client potentiel pour leur proposer un hébergement

L’arrivée du train à Saint Gervais accéléra l’arrivée des touristes dans la vallée et parfois l’on pouvait avoir quatre, cinq diligences arrivant directement de ce terminus.

Dès que le train arriva à Chamonix en 1901 les diligences cessèrent rapidement leurs voyages.  Et on allait entrer dans une autre période, celle des automobiles à moteur.

L’évolution de Chamonix entre 1864 et 1930 : intéressant

Il est intéressant de regarder l’évolution du développement de Chamonix. Après l’incendie de 1855 une grande partie de la ville disparut dans les flammes (rue Vallot actuelle). Il fallut beaucoup de temps à l’administration locale et préfectorale pour engager une reconstruction que le préfet voulait « donner à cette perle précieuse de la France pittoresque ».

Ci-dessous diverses photos permettant de voir l’évolution de la ville entre 1864 et 1930.

C’est seulement en 1864 que l’on voit la  première politique d’alignement appliquée à la rue principale. Ceci  grâce à la « générosité initiative du gouvernement qui par les subventions qu’il a accordé a permis à la commune de donner un tout nouveau aspect à Chamonix à la plus grande satisfaction des étrangers et des gens du pays… »

Les façades changeantes de l’église de Chamonix

Depuis le XIIème siècle,  Chamonix possède une église.  Elle ne fut  tout d’abord  qu’une chapelle pour les Bénédictins installés dans la vallée par les comtes de Genève,  construite selon  l’orientation traditionnelle  Est- Ouest.

dessin réalisé par Mr René Simond de l’association des l Amis du Vieux Chamonix

De par son emplacement, elle est au cœur de la vie chamoniarde.  Ici  ou à ses abords immédiats se déroulent nombre de cérémonies, réunions publiques.  Les chamoniards défendent leurs intérêts à l’intérieur même de cet édifice dont ils ont la charge. Elle est détruite par un incendie le 4 décembre  1583… «La maison et l’église du prieuré qui furent harses et bruslés ». On entreprend de nouveaux  travaux en 1587. Elle est  reconstruite si sommairement qu’en 1606, lors de la visite de l’évêque Saint François de Sales, celui-ci en note l’état de délabrement.

Probablement trop vétuste et devenue insuffisante ou exigüe,  elle est reconstruite de 1702 à 1709 dans son orientation  actuelle*, par des maîtres italiens originaires du Valsesia,  aux frais des paroissiens, hormis le chœur que financent les chanoines de Sallanches. Seul est conservé l’ancien  clocher.

L’église est de style baroque. Elle est consacrée le 8 septembre 1714. Le nouvel évêque remarque sa « magnificence » et la considère comme une des plus belles églises de son diocèse. Plus tard,  en 1758 un nouveau et violent incendie détruit la charpente et une grande partie du mobilier. L’église perd alors son décor typique du XVIIIème siècle.

Au  XIXème, la vallée s’ouvre au tourisme, l’église s’orne alors d’un décor empire qui subsistera jusqu’en 1926. Détériorée par les nombreuses infiltrations d’eau, l’église sera peu à peu dépouillée de son ornementation. Ne seront conservés  que le retable principal et les retables latéraux. Si l’aménagement intérieur  varie avec le temps et les modes, il en est de même pour sa façade extérieure qui d’une façade baroque magnifique (élevée en 1709), passe en 1840 à une façade composée d’un péristyle avec fronton triangulaire, celui-ci  reposant sur 4 colonnes. Cependant,  on remarque  à l’arrière les restes du décor baroque.

Ceci pour  une quarantaine d’année seulement car dès 1862, voulant rajouter une travée à l’église (afin de pouvoir recevoir plus de monde) sous les recommandations d’un architecte annécien Mr Camille Ruphy,  on modifie à nouveau  son aspect extérieur.

A l’époque,  Chamonix découvre et exploite depuis peu le granit, pierre si dure à travailler. La porte est ainsi agrémentée  d’encadrements de granit mais également  de lourds pilastres  qui ceinturent la façade orientée vers le sud. C’était une grande nouveauté pour l’époque.

Cette façade est toujours la façade actuelle.

L’église de Chamonix sera classée monument historique en 1979 après le passage de monsieur le président de la république Mr Valery Giscard d’Estaing.

source : Archives association des Amis du Vieux Chamonix

Le REGINA au village des PRAZ

Hôtel prestigieux de 5 étages construit en 1906 par Marie Couttet, veuve avec cinq enfants, qui en entreprend la construction après celle du National des Praz.

le Regina


A l’architecture typiquement chamoniarde, avec ses encadrements de granit, il possède à cette époque en face nord (sur la route nationale) un très beau porche d’entrée avec une marquise, hélas détruit depuis.
Sa face sud élégante rythmée par une alternance de balcons offre à toutes les chambres une vue magnifique sur le Mont Blanc. Une longue terrasse au rez de chaussée ouvre sur un grand parc et permet d’accéder aux jardins ombragés.
Il reçoit essentiellement une clientèle fidèle de médecins et d’enseignants d’Afrique du nord qui souvent restent tout l’été, du 15 juin au 15 septembre; pour cette raison il sera nommé un temps « le grand hôtel d’Orient ».
Cet hôtel, ainsi que le National, n’ouvrent qu’en été, la famille étant propriétaire d’autres hôtels sur la côte d’Azur. De ce fait, la clientèle n’a besoin que d’un chauffage dit de « demi saison » lors des froides journées d’été. Seuls les lieux communs fréquentés par la clientèle possèdent des radiateurs, et les clients ouvrent les portes de leurs chambres afin de profiter de la chaleur.
La Gendarmerie nationale rachète le bâtiment en 1967 pour y recevoir les familles de gendarmes en vacances.
Il est rehaussé de deux étages en son sommet, notamment pour y installer un restaurant panoramique, et d’une cage d’ascenseur sur le côté dans les années 1970. Cette transformation esthétiquement malheureuse détruit complètement l’équilibre originel de cet élégant bâtiment chamoniard.

 

L’enfant de Shôzô Hamada : une statue ravissante

Une adorable petite statue orne depuis 1998 l’entrée des jardins de Fujiyoshida (au dessus du parking saint Michel à sa sortie supérieure).


Arrêtez- vous ! Elle vous sourit, vous interpelle, vous invite au à la sérénité.
Cette statuette exprime la douceur. Elle dégage tant de de quiétude que nous pourrions avoir envie de l’emporter !

Offerte à Chamonix, à l’occasion du vingtième anniversaire du jumelage de Chamonix avec Fujiyoshida, la cité japonaise a fait appel à Mr Shôzô Hamada sculpteur japonais, originaire de la ville. Cette statue est un joli témoignage de la nature des liens qui lient Chamonix à Fujiyoshida, sa ville jumelle depuis 1978.
Cette œuvre, intitulée « warashiko »signifie « l’enfant » .Elle révèle le sentiment profond d’un homme attentif aux émotions de ses semblables. Les mains magiques de cet artiste transforment ce matériau dur, si difficile à travailler. Il le réchauffe, le modèle et arrive avec une habileté étonnante à donner une lumière au regard de cet enfant. C’est magnifique… Parvenir à faire parler la pierre avec une telle expression est bien la preuve de son talent.

Arêtez- vous !  Elle vous sourit, vous interpelle, vous invite au à la sérénité.

Cette statuette  exprime la douceur. Elle dégage tant de  de quiétude  que nous pourrions avoir  envie de  l’emporter !  

Offerte à Chamonix,  à l’occasion du vingtième anniversaire du  jumelage de Chamonix avec Fujiyoshida, la cité japonaise a fait appel à Mr Shôzô Hamada  sculpteur japonais, originaire de la ville. Cette statue  est  un joli  témoignage  de la nature  des liens qui lient Chamonix à Fujiyoshida,  sa ville  jumelle depuis 1978.

Mr Shôzô Hamada a sculpté ainsi de très nombreuses petites statues du même matériau. Essaimées dans tout le Japon,  elles font la joie des japonais.

Source : Chantal Lafuma, association jumelage Fujiyushida

Sur les pas des voyageurs d’autrefois : de Martigny à Chamonix

Après le rattachement de la Savoie à la France, Napoléon III veut visiter ses nouveaux territoires et vient dans la vallée de Chamonix. Lors de sa venue, il fait un temps épouvantable. Effaré par le dangereux chemin muletier qui le conduit à Chamonix, Il décide de financer la construction d’une route carrossable de Sallanches à Chamonix, route qui sera terminée en 1870. Très vite, les diligences assureront la liaison entre Genève et Chamonix. La route nationale est tracée vers Argentière puis arrive dans la vallée de Vallorcine entre 1882 et 1886. Un nouvel itinéraire vers la Suisse est alors tracé.
Mais qu’en est il de la route de l’autre côté de la frontière, en direction de Martigny. ?


Autrefois, pour accéder en Suisse, les voyageurs empruntaient le col de Balme (récit de Goethe lors de son passage dans la vallée en novembre 1779) : « …notre guide nous propose de passer le col de Balme, haute montagne au nord de la vallée du côté du Valais … de ce point élevé nous pouvons encore , si nous sommes heureux, contempler d’un coup d’œil la vallée de Chamonix…. ».
C’est à partir de 1825 que les valaisans déposent un projet de « route à chars » pour relier Martigny à Chamonix. On décide alors de passer par la Tête noire et le col des Montets.
Le passage de la Tête noire était connu de longue date comme un étroit chemin appelé le « mauvais pas ». Le voyageur était contraint de descendre de son mulet en raison de la difficulté du passage au dessus du vide. Le percement d’un tunnel s’impose donc, et les travaux de la « roche percée » de Tête noire sont réalisés entre 1827 et 1836. C’est à cet endroit que s’ouvre en 1834 une auberge, futur hôtel qui ne sera détruit que lors de la modernisation de la route en 1950.


Le pont au niveau de la frontière suisse-sarde est refait à neuf en 1840.
Cependant, en raison des gros frais engagés, les travaux de la route avancent lentement.
Théophile Gautier, en 1868, nous précise dans son ouvrage « Les vacances du lundi » que le trajet se fait encore à pied ou à dos de mulet, mais que la route commence à être praticable aux chars légers. Mais la pente est si raide entre Martigny et le col de la Forclaz qu’en 1871 le conseil d’Etat doit rappeler que le parcours reste un chemin muletier interdit à tout véhicule. La route ne devient officiellement carrossable qu’en 1875 et le passage du Châtelard sera élargi en 1888.
La concurrence de la route des diligences de Vernayaz, Salvan, les Marécottes et Finhaut sera longtemps d’une vive concurrence.
De plus l’itinéraire resta longtemps dangereux et impressionnant. Dans le livre «les folles années de Chamonix », Gaby Curral Couttet raconte : « … Tête noire porte bien son nom, je n’osais regarder dans un décor triste et sombre, ces abîmes à pic… Deux voitures ne pouvaient se rencontrer sans friser la catastrophe si bien qu’il était obligatoire de téléphoner du Châtelard à Tête noire et de Tête noire à Martigny pour savoir si la voie étai libre : que de fois avons-nous été contraints de nous arrêter à Tête noire pour attendre souvent plus de deux heures le passage de la voiture engagée dans l’autre sens… maman nous racontant le parcours qu’elle avait fait en diligence où le lourd véhicule risquait à tout moment de basculer … »
Ce n’est que plus tard dans les années 1950 que la route sera modernisée devenant largement plus accessible.

Sources : Sandro Benedetti : les voies de communications et le développement touristique. Les chemins historiques du canton du Valais. Berne : 2003

 

Aux Bouchards et à Vallorcine des représentations et inscriptions identiques du XVIIIème siècle

Dans la vallée de Chamonix nombreuses sont les inscriptions sur des poutres ou sur des greniers . Elle sont le témoignage du travail des anciens.

Mais savons nous les voir ?


Aux Bouchards sur le fronton d’un grenier la date 1742 – une herminette dans la partie supérieure. En bas une croix de Savoie – une serpe ou une hache – des initiales LB
A Vallorcine sur la poutre maîtresse d’une ancienne ferme une inscription similaire la date 1789,  surmontée de la croix de saint Maurice , au dessous les initiales JMC – une serpe ou hache – une équerre -une herminette

La petite chapelle des Chosalets

Parmi les nombreuses chapelles disséminées dans la vallée de Chamonix, celle des Chosalets, située à l’entrée du village, a ceci de particulier qu’elle est privée. La légende familiale des Ravanel raconte qu’en ces lieux avait été trouvée une statue du 16ème siècle. Quelle était cette statue, d’où venait-elle ? Nul ne le sait plus, mais il est vrai que le passage de la révolution française dans la vallée avait vu la destruction de nombre d’oratoires et chapelles.


Jeanne Ravanel, originaire du hameau et propriétaire de quelques terrains, entreprend alors la construction d’une chapelle. Celle-ci sera bénie et consacrée par le révérend Pinget de l’église d’Argentière le 17 août 1875. Elle prendra le nom de Notre Dame du Bon Secours.
Au 19ème siècle nombre d’enfants mouraient en bas âge, ce qui était toujours un grand drame. Notre Dame du Bon Secours était évoquée essentiellement pour la protection des enfants et des mères. Aussi naturellement Jeanne choisit-elle de consacrer cette petite chapelle à la Vierge Marie priée si souvent par les mamans.
A la disparition de Jeanne, les neveux héritent de cette modeste chapelle. Les générations se succèdent. Toutes, au fur et à mesure du temps qui passe, entretiennent cet édifice, témoignage patrimonial important pour le village.
Des travaux d’entretien sont toujours indispensables, mais pas faciles à réaliser. Aussi la famille crée en 2002 une association loi 1901 qui permet de financer les travaux de restauration et de rénovation nécessaires à l’extérieur. On refait les ancelles et un joli coq trouve sa place au sommet du petit clocher. En 2011 on entreprend la réfection de la peinture des façades extérieures, de la porte d’entrée et des volets.
Elle a maintenant fière allure.


A l’intérieur trône un petit maître autel néo gothique en bois, typique de cette période de la fin du 19 ème siècle. En son milieu, Notre Dame du Bon Secours avec l’enfant Dieu dans ses bras. A sa droite une statue de Saint Joseph, toujours évoqué lui aussi pour protéger les familles. A sa gauche Saint François de Sales, le saint évêque originaire de la région d’Annecy et si aimé par la population savoyarde. Sur les côtés deux statues, le Sacré Cœur et St Antoine de Padoue.
Malgré l’entretien régulier de la famille, l’intérieur se dégrade. Chapelle privée elle ne peut recevoir de l’aide de l’état. Comment cette petite association familiale peut elle arriver à la tenir en bon état ?
L’été, la famille s’efforce de la maintenir ouverte et est toujours joliment fleurie.

Finalement afin de préserver ce petit patrimoine témoin de la vie des Chosalets la famille en fait don à la commune

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