En 1895, le pont de la Griaz sur le chemin de la rive gauche de l’Arve est emporté par une crue dévastatrice. Le chemin de fer, alors en projet sur cette même rive aurait certainement été emporté. Les dirigeants du PLM (Paris-Lyon-Méditerranée) ne veulent pas prendre le risque de voir la ligne détruite. Contrairement à l’idée reçue, le changement du tracé prévu à l’origine rive gauche de l’Arve est bien dû aux caprices de la nature et non aux habitants.
L’ouvrage conçu en pierres de granit se compose de sept arches de quinze mètres de long, le tout surplombant l’Arve de 52 mètres. Le viaduc en forme de S s’appuie sur des piles de 4.30 mètres de côté et de 6.40 mètres pour la grande arche. Il franchit la route départementale, ce qui augmente sa longueur de 130 mètres.
A l’origine, le viaduc Sainte Marie devait compter uniquement un tablier métallique central de 50 mètres de long. Mais l’armée, toujours impliquée dans toute construction importante, même ferroviaire, craint qu’en cas d’invasion celui-ci puisse être sabordé aisément. Le ministre de la guerre impose l’usage exclusif de la pierre. Le ministre des travaux publics choisit lui-même la forme des moellons !
Source : Archives départementales – Association des Amis du Vieux Chhamonix
De part et d’autre de l’entrée de l’église saint Michel de Chamonix se trouvent deux vitraux magnifiques pas vraiment classiques dans l’iconographie religieuse traditionnelle.
Signés de Louis Balmet, maître verrier à Grenoble, ces deux vitraux tranchent avec l’ensemble du décor de l’église apparenté à un style néo classique.
Les avez-vous regardés avec attention ?
L’un représente saint Bernard de Menthon terrassant, de son bâton de montagne, un diable à queue de serpent .Celui ci s’apprête à détacher un énorme rocher et à le précipiter sur des alpinistes en train d’escalader. Ils sont en toute confiance, avec sacs et piolets, sur, le chemin les conduisant vers le sommet . Saint Bernard les protège. L’autre représente saint Christophe, portant le Christ sur son épaule, il veille, du haut de montagnes ennuagées par une tourmente, sur des skieurs et sur un bobsleigh empruntant un virage.
Quelle originalité ! Avons-nous déjà vu des vitraux traitant de ce thème ? Et d’où nous vient donc ce sujet si peu classique ?
En 1925 (une année après les J.O. de Chamonix), le chanoine Rhuin, curé de Chamonix, soutenu par le maire Jean Lavaivre, décide de changer les vitraux en place. Ce prêtre est, par ailleurs, celui qui sera à l’origine de l’organisation de la fête des guides le 15 août, afin de mettre les alpinistes chamoniards sous la protection de la Vierge. Il est vrai qu’il était un grand admirateur de ces guides de montagne dont il appréciait le caractère « bourru » et qui avait, avec le temps, réussi à les amadouer.
Il fait appel au pape Pie XI, ancien évêque de Milan, le fameux Achille Ratti qui avait une passion pour la montagne et qui avait fait en son temps l’ascension du Mont Blanc.
Le chanoine Rhuin obtint ainsi une prière spéciale et surtout la nomination de saint Bernard de Menthon comme protecteur des guides et des alpinistes et de saint Christophe qui bien que traditionnellement était évoqué comme protecteur des voyageurs, aura à Chamonix la charge de protéger les utilisateurs des moyens de transport locaux : skieurs et conducteurs de bobsleigh!
Ce sera une réussite ! Ces deux vitraux originaux se remarquent, non seulement par leur thèmes particuliers, mais surtout par cette gamme de couleurs chaudes qui s’en dégage, ces formes joliment ondulées, cette belle évocation du monde de la montagne et cette symbolique si chère aux chamoniards.
A rattacher plutôt à une expression art nouveau qu’à celle de l’époque qui était celle de l’art Déco.
Bravo Mr Balmet.
Bibliographie : Revue club alpin français — archives diocésaines
Elle appartient à l’Eglise Réformée de France mais certains chamoniards continuent à l’appeler la chapelle anglaise !
Nul n’ignore l’importance de la communauté britannique à Chamonix. Elle remonte au XVIIIe lorsque les premiers visiteurs dans la vallée de Chamonix se révèlent être des anglais.
Par la suite et au cours du siècle suivant, ils marqueront à jamais l’histoire de la vallée. Touristes, scientifiques, alpinistes anglais créeront des liens toujours forts avec les chamoniards.
En ce milieu du XIXe, il manquait aux britanniques, de rite anglican, un lieu pour exercer leur culte. Ce sont les hôteliers chamoniards qui ouvraient chaque dimanche leurs salles à manger afin d’assurer le service anglican pour leurs clients. Bien vite, ces salles sont devenues trop petites. C’est alors que « la Société de l’église coloniale et continentale de Londres » demande à la préfecture l’autorisation de construire une chapelle. L’accord est donné, mais on les prie de construire au-delà du centre du village. La société acquiert ainsi de la famille de Mr Desailloud, propriétaire du café de la Fidélité à Chamonix, un terrain pour y bâtir un temple.
La chapelle est construite dès 1859, et inaugurée en 1860. Loin du centre, elle trône, magnifique, au milieu des prés. D’un côté l’on voyait la chute du glacier des Bossons de l’autre celle de la Mer de glace. Pendant ces années de Belle Epoque, des chapelains assuraient les services religieux. Ils consignaient sur un registre tenu à cet effet le nombre des fidèles, les difficultés climatiques, les dépenses effectuées, les personnages importants de passage, le nombre de services. Ceux-ci ne venaient cependant que durant l’été. L’hiver aucun service n’était assuré.
A l’origine le chœur devait, comme toute église anglicane, être orné de vitraux. Seul un a été réalisé, le coût trop élevé et l’arrivée de la guerre ont définitivement arrêté le projet.
Mais lorsqu’il fallait enterrer les quelques anglais décédant dans la vallée, ceux-ci devaient être inhumés dans le cimetière catholique. Et le curé de l’époque manifestait sa désapprobation en ne leur laissant des places qu’hors de l’enclos autorisé.
Ce sont les hôteliers chamoniards ainsi que Venance Payot, maire de Chamonix à l’époque, qui insisteront auprès de la préfecture pour que la petite chapelle anglicane puisse abriter son propre cimetière. En 1871, la communauté anglaise obtient l’autorisation d’y inhumer ses morts. Avec le temps, une vingtaine de britanniques seront enterrés à proximité immédiate de la chapelle.
La première guerre mondiale apporte un changement notoire. Les anglais ne sont plus aussi nombreux à venir à Chamonix. Et peu à peu la chapelle sera utilisée par l’Eglise Réformée de France, bien que les murs soient encore la propriété de « la Société de l’Eglise Coloniale et Continentale de Londres ». Le cimetière accueille alors les inhumations des familles protestantes de Chamonix.
Lors de la loi imposant de mettre les cimetières à l’extérieur des centres villes, la municipalité recevra une lettre de la société demandant expressément que l’on conserve ce petit cimetière à son emplacement afin de conserver la mémoire de ces britanniques qui avaient participé à l’enrichissement de Chamonix ! La commune obtempéra, d’autant que le cimetière était privé.
L’histoire cependant continuera avec les Misses anglaises. Bien qu’anglicanes, elles entretiendront durant la période de l’entre deux guerres l’entretien du temple soutenant le pasteur Chaptal qui assuraient les services religieux à la grande satisfaction des protestants de la commune. Et lors de la sombre période de l’occupation de la seconde guerre mondiale, les fameuses Misses participeront d’une manière très active à l’engagement de la résistance. Elles étaient très aimées des chamoniards.
La chapelle anglaise, devenue temple protestant, est cédée en 1970 puis vendue pour un franc symbolique le 29 juillet 1981 à l’Eglise Réformée de France. Cependant, les anglais, de nouveau nombreux à Chamonix, reconnaissent le temple comme leur chapelle en raison de son histoire plus que centenaire et de l’esprit commun protestant les liants à l’église réformée et bien souvent on peut assister à un mariage anglican assuré par le pasteur de la paroisse du Mont Blanc.
Sources : archives départementales – Eglise réformée de France –
Me connaissez-vous? Vous êtes-vous arrêtés près de moi? M’avez-vous bien regardée? Je suis pourtant là, tout près de la Maison de la Montagne.
Je vois défiler du monde, beaucoup de monde…
Mais combien s’arrêtent devant moi? Savez-vous qui je suis et pourquoi je suis là?
J’ai été réalisée par Gilles Vitaloni, sculpteur diplômé des Beaux Arts de Carrare, sorti de l’école d’art Pietra Santa. Ce n’est pas rien! Il adore travailler le marbre, cette matière si exigeante, si délicate à sculpter.
En 1992, il participe à un tour de France de la sculpture dans le cadre des J.O. d’Albertville et réalise des œuvres d’art en public, Chamonix sera une de ses étapes. Peut être certains se souviennent-ils de Gilles travaillant devant le foyer de ski de fond de l’époque! Parce qu’il est à Chamonix, c’est sur un bloc de granit, que Gilles travaille à son œuvre. Certes, la pierre ne provient pas de la vallée mais du Tarn où sont encore exploitées dans les années 1990 des carrières de ce matériau si dur à façonner. Gilles travaille en public, il aime échanger avec les promeneurs. Il veut que chacun participe à son œuvre. Il s’inspire des remarques faites par les flâneurs. Il me donne mon nom: Escalade. Oui, car ici dans cette vallée l’alpinisme se confronte à ce granit, si robuste, si compact et si puissant. Regardez-moi. Admirez les 4 faces de mon bloc !
Je suis à l’image de l’esprit rude du montagnard. Je suis là, ancrée dans ce paysage, près de cette maison qui voit défiler tant de guides connus ou pas, et dont l’activité, l’escalade, est le cœur de leur vie. A mon pied le nom de Chamonix est gravé car je devais partir représenter la station ailleurs! Le choix de mon sculpteur était «ESCALADE» Finalement je suis restée ici. Gilles a eu la modestie de ne pas graver son nom. Dommage ! , ne mériterait-il pas d’avoir son nom gravé à mon pied?
L’hôtel le Savoy était occupé depuis 1963 par le CIT puis en 1970 par le Club Méditerranée. Cette année il va vers un nouveau destin. Mais connaissez vous son histoire ?
Photo collection Gay Couttet
Elle s’appelle Sarah, est la quatrième de la fratrie de 5 enfants de la famille François Couttet dit « Baguette ». Elle a 16 ans à la mort de son père, 18 à la mort de sa mère. Élevée dans la pure tradition hôtelière depuis sa petite enfance, elle seconde sa sœur aînée Aline pour gérer l’hôtel familial du Grand Hôtel Couttet, jusqu’à la majorité de ses frères Jules et Joseph.
En 1899 à l’âge de 26 ans elle se marie avec Adolphe Tairraz le frère du grand photographe Georges Tairraz. Dans la succession elle hérite d’un beau terrain au pied du Brévent. Et c’est là qu’en 1901 elle lance avec l’aide d’un emprunt auprès d’une banque suisse la construction d’un hôtel de luxe. Elle l’appelle le Savoy Hôtel, nom choisi en raison du célèbre « Savoy Hôtel » de Londres connu par toute la clientèle internationale. C’est le cabinet d’architecture genevois De Morsier et Weibel qui construit cet élégant hôtel à l’image des palaces européens. Celui-ci connait immédiatement un vif succès. C’est le premier hôtel à posséder l’eau courante dans toutes les chambres dont les suites possèdent des salles de bain. Un ascenseur est installé
en 1903 et un orchestre joue tous les soirs dans la grande et magnifique salle à manger de l’hôtel.
Adolphe meurt en 1906 la laissant seule avec 2 enfants Armand et Germaine. Elle a 33 ans. Seule, elle gère avec brio l’hôtel. En pleine Belle Epoque le Savoy Hôtel connait un réel succès. On y voit la reine d’Italie, son altesse impériale et royale Otto de Habsbourg, la belle actrice Rose Caron ou le milliardaire américain Pierpont Morgan et même le légendaire Buffalo Bill en 1907 ! Elle s’engage alors dans le projet d’un agrandissement. Sous la conduite d’un autre cabinet d’architecture genevois c’est Joseph Guglielmetti entrepreneur ambitieux qui le réalise. Ce sera la magnifique aile couronnée d’un toit pyramidal et sur lequel elle fait sculpter une croix de Savoie de chaque côté du balcon supérieur. Dans la même année elle inaugure cette aile particulière et épouse l’entrepreneur le 7 juillet 1911 avec qui elle aura 4 enfants.
Publicité été avec les tennis années 1935 Collection Bernadette Tsuda
L’hôtel prend le nom de Savoy Palace.
Il connait alors ses heures de gloire jusqu’à l’entrée en guerre de la première guerre mondiale. Les années d’après guerre appelées les « années folles » voient arriver au palace une clientèle excentrique, riche.Les journaux locaux se font l’écho de ces fêtes somptueuses se déroulant au Savoy palace : « orchestres, danse, bals masqués, fêtes mondaines et galas, compétitions de tennis » sont les publicités de l’époque. Avec l’arrivée de la seconde guerre mondiale son fils Armand Tairraz prend la relève et gère le palace un temps avec son demi frère Charles Guglielmetti.
En 1945-1946 l’architecte Henri Jacques le Même aménage la terrasse supérieure. L’hôtel reprend en 1947 son nom d’origine « Savoy Hotel » perdant sa qualité de palace, Armand ayant beaucoup de peine à maintenir à flot cet ancien hôtel de luxe. Les travaux de modernisation sont trop coûteux et de plus il ne s’entend guère avec son demi frère et les frais liés à l’indivision sont particulièrement élevés pour Armand.
Le glorieux établissement sera finalement acheté en 1960 par le baron Elie de Rotschild, très vite il se rend compte qu’il perd chaque année 50 millions de francs. Confié à un fond de pension l’hôtel est loué au CET ( (club européen du Tourisme) en 1963 . Ce CET Absorbé par le Club Méditerranée le Savoy deviendra en 1970 un de ses fleurons.
Depuis de nombreux travaux ont été réalisés. Mais quasiment tout du décor original disparaît dans des travaux de modernisation. Fort dommage car on aurait pu, à l’image du Majestic, garder et rénover au moins l’ensemble des salons et salle à manger ! Même l’escalier principal a disparu !
Le Savoy Hôtel n’est plus occupé par le Club Méditerranée. Propriété d’un fond de pensions il est à ce jour loué à un nouveau groupe hôtelier appelé Folie Douce.
L’ensemble du rez de chaussée a été entièrement détruit pour ne faire qu’un seul et unique espace . Plus rien n’existe du palace d’antan , ici les murs sont bruts de décoffrage! Le décor est surprenant ! parfois intrigant. En tout cas très décalé. Certains peuvent aimer !
La façade principale est , de nuit, éclairée par une lumière passant du bleu au rose…à l’image des maisons closes des années 1900 !
L’entrée ouvre sur un bar monumental, de là un escalier conduit dans une fosse où musique , danseurs , clients se mêlent dans une rumeur houleuse et bruyante. Trois restaurants aux thème différents se trouvent sur le même niveau. 250 chambres aux tarifs variés du très cher au bon marché, 220 personnes y travaillent….
Le temps passe, que restera t’il de cet ancien palace fleuron de l’architecture chamoniarde .
Les deux Croix de Savoie ornant le balcon supérieur de l’aile construite en 1911 et la très belle ferronnerie typique Art Nouveau
Je suis « l’ange protecteur de Chamonix ». Je suis là pour protéger la vallée de Chamonix, tout particulièrement pour veiller sur les alpinistes avant leur départ en montagne.
Caché, peu me connaissent !
Je suis juste à l’arrière de la Maison de la Montagne au-delà de la passerelle.
Je viens de Davos, offerte pour les 25 ans du jumelage de nos deux stations. Mon sculpteur, Andréas Hofer a été choisi pour symboliser cette amitié commune. Il aime ce monde magnifique et rude de la montagne c’est pourquoi il a été choisi pour me réaliser !
J’ai de nombreux autres coreligionnaires me ressemblant dans les montagnes de Suisse et d’Autriche. Venez donc me voir !
Le premier refuge alpin de Chamonix : le temple de la Nature au Montenvers
Il a vu passer Chateaubriand, les impératrices Eugénie, puis Marie Louise et aussi Victor Hugo, Charles Nodier, Lord Byron, Mary Shelley, Georges Sand, Liszt, Alexandre Dumas et tant d’autres…. Il est maintenant en bien piètre état… Notre fameux « Temple de la Nature », chanté par les romantiques du 19ème siècle.
Qu’est-il ? Un petit bâtiment de forme ovoïdale, situé au Montenvers, au-dessus du Grand Hôtel du Montenvers .
Il faut dire qu’il est là depuis 1795. Il a succédé à un petit abri offert par un anglais, Mr Blair, en 1779, pour abriter les voyageurs venus découvrir la Mer de Glace. Très vite en mauvais état, il est abandonné. Les voyageurs ont des difficultés pour s’abriter des intempéries.
Chamonix doit alors la construction du nouveau bâtiment à Mr Marc Théodore Bourrit. Mr Bourrit, chantre genevois, est amoureux fou de cette vallée. Il est le meilleur publicitaire de l’époque et est désolé de l’aspect du vieil abri. Il obtient l’appui financier nécessaire de la commune de Chamonix et du « Résident de France de Genève » pour mettre en route la construction d’un nouvel édifice.
« Le 10 floréal an III de la république, une et indivisible, vu la pétition du citoyen Bourrit… tendant à et autorisé à faire construire une maison sur le mont envers destinée à recevoir les voyageurs savants et à contenir tous les instruments de musique nécessaires pour observer les rares beautés de la nature… Ne laissent pas douter que cet établissement ne soit une bienfaisance pour la commune qui deviendra propriétaire de la bâtisse et pour les amateurs et les savants qu’elle attirera en leur présentant tout à la fois un hospice et un observatoire à près de 800 toises au dessus de la mer où est suspendu le glacier du Montenvers.
C’est le premier refuge alpin. Il comprend une pièce et un petit grenier. Il est alors dédié à la nature, d’où son nom « le Temple de la Nature ». Il sera malheureusement vite dégradé, mais aussi vite restauré par le comte de Pontencoulant, préfet d’Empire qui remet à l’aubergiste Mme Coutterand les fonds nécessaires pour les réparations.
C’est alors que le refuge connaît ses heures de gloire et que l’on y verra passer les plus grands noms de la littérature, de la peinture et des sciences. En 1817, Joseph Tournier, le premier adjudicateur du Montenvers, y ouvre une boutique de naturaliste. Il est repris en 1827 par Joseph Marie et David Couttet qui en font un cabinet d’histoire naturelle et installent un registre de voyageurs. C’est le passage obligé des voyageurs au Montenvers!
En 1840 est construit juste à côté une auberge qui deviendra un petit hôtel. Mais les visiteurs s’arrêtent encore au temple de la nature. La construction du grand hôtel du Montenvers en 1880 lui sera néfaste… Il servira de buanderie…
Très endommagé, il est sauvé en 1950 par Charles Vallot. Il fait appel au comité des Sites et Monuments historiques du Touring Club. Mr Laprade, architecte en chef des palais Nationaux, dirige les travaux. Il est joliment restauré, mais peu à peu la commune s’en désintéresse et ne se préoccupe pas de l’entretenir.
Il faudra attendre 1973 pour que l’on entreprenne des travaux de réhabilitation grâce à l’association des AMIS DU VIEUX CHAMONIX. Une équipe de guides chamoniards dirigés par les services techniques de la ville entreprennent la restauration du « Temple de la nature » et des anciennes écuries. L’association se voit confier l’entretien du bâtiment et la charge d’en faire un mini musée pour les périodes estivales.
Ce mini musée fonctionnera jusqu’à la période où le musée alpin devenant un musée d’Etat l’association ne peut plus s’occuper du « temple ».La commune l’abandonne, le Musée alpin ne s’en occupera plus.
La compagnie du mont Blanc a il y a quelques temps proposé une animation. Puis plus rien.
Depuis notre temple de la nature se détériore peu à peu…
La compagnie du mont Blanc a il y a quelques temps proposé une animation. Puis plus rien.
Depuis notre temple de la nature se détériore peu à peu…
Sources : Théodore Bourrit – Charles Vallot – Archives Amis du Vieux Chamonix
Les Argentérauds l’affirment : oui, il est le plus beau !
A la vue des anciennes lithographies ou tableaux, le clocher n’a pas la forme connue de nos jours. Comme pour les églises de l’ancien duché de Savoie, le clocher est relativement simple, une flèche s’élançant vers le ciel, à l’image des églises savoyardes.
En fait, le clocher d’Argentière subit ce que tous les clochers savoyards vont connaître durant la période révolutionnaire. Le gouverneur Antoine Albitte, envoyé pour établir le gouvernement révolutionnaire en 1793, ordonne que « toutes les maisons des villages soient à même hauteur y compris les anciens bâtiments de culte ». Ce Robespierre savoyard fera raser tous les clochers de Savoie en 1794 : 800 clochers détruits, 1600 cloches fondues !
Mais voilà, le temps passe, et dès 1815, sous la restauration du régime sarde, les églises peu à peu sont reconstruites. Les Houches, Chamonix, Argentière entament les travaux de reconstruction de leur clocher. En 1815 on voit les autorités locales s’inquiéter de l’état du clocher d’Argentière et décider de vendre des terrains afin de financer les travaux de sa restauration. Il faudra attendre 1845 pour voir enfin les travaux achevés.
A l’époque, l’ensemble des clochers de la vallée sont reconstruits selon un modèle dit « clocher à bulbe ». Pourquoi ? Peut être les artisans se sont ils inspirés des clochers à bulbes de certaines anciennes églises savoyardes réalisés dans d’autre communes.
Il est notoire que c’est d’au-delà des Alpes leur sont parvenus le dôme et le lanternon, soit de Franche Comté, soit des pays germaniques ou encore d’Italie. Les artisans savoyards émigrants ont su s’inspirer des idées créées ailleurs ; Il les ont adaptés . Celui d’Argentière est le plus sophistiqué, le plus élégant de la vallée.
A sa base, on voit une première partie octogonale surmontée d’un lanternon ceint d’une galerie, il y a ensuite un premier dôme, un second lanternon et un second dôme et finalement une flèche.
Sa beauté est incontestable, on remarquera son parfait équilibre.
A l’époque de sa réalisation, le clocher avait été recouvert d’écailles de fer blanc, une tôle d’acier recouverte d’étain. Ce fer blanc avait la particularité de rouiller ce qui donnait au clocher une couleur dorée très chère aux Argentérauds. Cette couleur était produite par un processus intéressant. En fait, les conditions d’étamage de l’époque n’étant pas parfaites, l’eau réussissait à traverser l’étain jusqu’au fer donnant à notre clocher cette couleur si chaude.
Ce clocher magnifique semble en effet être « doré ». Grand nombre de visiteurs l’admirant s’imaginent qu’il est recouvert de petites tuiles de bois. L’illusion est parfaite !
Lors de la restauration de 1986, le curé Eyrehalde tenait avant tout à retrouver cette couleur. Mais les techniques modernes de fer étamé ne permettaient plus d’obtenir le même résultat .Les Argentérauds partirent alors à la recherche d’un artisan travaillant « à l’ancienne ». C’est finalement en Angleterre que l’on trouva un professionnel capable de fabriquer ces tuiles si particulières.
Et c’est grâce à Gérard et Thierry, Compagnons du Tour de France, après des milliers d’heures de travail acharné pour la pose des tuiles, que le clocher retrouva son aspect si original.
Il fut inauguré le dimanche 24 janvier 1986. Ce clocher magnifique semble en effet être « doré ». Grand nombre de visiteurs l’admirant s’imaginent qu’il est recouvert de petites tuiles de bois. L’illusion est parfaite .
Au delà des Houches, dans ce petit vallon caché de Vaudagne sur le chemin vers le mont Borrel se niche un hameau des plus magnifiques.
Ici le temps est suspendu. Quelques maisons, entourées de greniers et remises, un four à pain. Pas de clôtures. Il y a les Bouchards d’en haut, avec trois maisons, les Bouchards d’en bas avec cinq maisons. En patois on dit les Bouchards d’ava et les Bouchards d’amon.
On apprécie ce milieu préservé, authentique. Certaines de ces anciennes fermes ont été restaurées, sans ostentation, dans le respect del’architecture originelle. La plupart datent de la fin du 18ème, début du 19ème. Sur la mappe sarde on en comptait un plus grand nombre.
Ces fermes sont édifiées selon le même plan, comme toutes celles de notre vallée. Leurs bases sont construites avec les pierres des torrents, jointoyées à la chaux puis crépies également à la chaux. Ce rez-de-chaussée abritait à la fois les hommes, à l’aval du bâtiment vers le soleil. et les animaux à l’amont (vaches- chèvres-cochon, parfois un mulet).Le long des façades, sur le pignon avant, courent des galeries où l’on faisait sécher le linge et aussi les petites récoltes comme les oignons ou les prunes produites dans les champs du côté de Servoz -Passy. De même pour le chanvre ou le lin qui étaient suspendus à de longues perches accrochées au pignon.
Pour accéder à l’intérieur on emprunte une sorte de « sas » appelé le « devant de l’Outa ». Celui-ci donne sur deux portes. L’une ouvre sur un un couloir appelé « puech » par lequel on accédait au logement familial, d’abord à la cuisine appelée outa. Outa lieu de la « bourne » immense cheminée traversant la totalité de la maison. A l’intérieur on y fumait les salaisons, provisions indispensable pour la survie de toute la famille.
De là on accédait au pèle, pièce chauffée par un poêle, le lieu de vie de la famille. Parfois trouve t-on une chambre supplémentaire pour les parents.
Du « devant de l’outa » une autre porte donne accès à l’écurie où se tenaient les bêtes le temps des longues périodes d’hivernage.
Au sous-sol se trouvait la cave. Y étaient entreposés les fromages fabriqués par la famille, les salaisons fumées ou salées sur place, les réserves de « tartiffles » (pommes de terre) ou fruits produits dans les environs.
La partie supérieure abrite la grange à foin. Une charpente dite « à colonnes » s’appuye sur la maçonnerie du bas. Les parois sont formées par un mantelage de planches horizontales non jointes afin d’aérer l’ensemble. Adossée à l’amont, est aménagé un accès de plain pied. On stockait « les trosses » de foin, afin de nourrir les bêtes durant les longs mois d’hiver.
Chacune des ses fermes possède un, voire deux greniers. Un four a été restauré.
Ici on est en paix. Respectons ce lieu magnifique…
A 1265m d’altitude, on la distingue à peine dans le paysage, perdue qu’elle est dans l’immensité de la montagne. Il faut être à son pied pour prendre la mesure de cette statue monumentale. Elle mesure 25mètres de haut, pèse 500 tonnes. Imposante, campée sur un éperon rocheux de 50m, elle domine de 200m le fond de la vallée face au Mont-Blanc. A l’époque on devait la voire de très loin, la forêt n’était pas aussi dense qu’actuellement.
Mais quel est donc l’histoire de cette statue inaugurée en 1933 ? Pourquoi à cet endroit dans la vallée de Chamonix une statue du Christ Roi .
Carte postale années 1940…
C’est un abbé, l’abbé Claude Marie Delassiat, curé des Houches en 1926, qui rêve de rendre hommage au pape Pie XI mieux connu, dans la vallée, sous le nom d’Achille Ratti. Il avait gravi le Mont Blanc côté italien en 1890, il avait logé aux Houches. Devenu pape, il avait proclamé, dans une encyclique, la royauté universelle du Christ c’est-à-dire la primauté du Christ Roi sur l’homme alors que monte en Europe la vague des dictatures. Cette statue veut symboliser l’amour et la paix entre les hommes. Projet soutenu non seulement par l’évêque, le Vatican et les instances politiques mais aussi par les habitants de la vallée. L’abbé lance une souscription. En 3 ans il récolte la somme nécessaire pour la réalisation de son projet.
On fait appel à un sculpteur parisien, George Serraz , spécialiste de l’art religieux. L’architecte Viggo Féveile, installé à Chamonix, supervise l’ensemble des travaux. Ce sera donc une statue monumentale en béton, matériau devenu à la mode depuis l’après guerre. On imagine les difficultés rencontrées pour la réalisation des travaux dans ce lieu qui n’était desservi par aucune route carrossable. La base de la statue sera composée de blocs de béton coupés en tranches, puis assemblées sur place. Le buste, les bras, la tête sont réalisés tout d’abord en terre. De ces réalisations on en ferra des moules en plâtre. Le béton sera alors coulé dans ces moules. Quelques détails seront travaillés directement sur le béton frais.
Le socle de ce monument abrite une chapelle avec deux autels où deux prêtres pouvaient officier en même temps. Elle et est décorée de diverses statues dont un buste du pape Pie XI et d’une statue de « Marie reine du monde ». Un escalier tournant de 84 marches à l’intérieur permet d’accéder à une plateforme dissimulée derrière la couronne. On dit même qu’un passage existe le long du bras qui bénit !
Cette statue est non seulement typique de l’art religieux de l‘époque dans un contexte international de gigantisme mais elle est par ailleurs une émanation explicite de l’art décoratif. Cette expression artistique de l’entre deux guerre se révèle ici dans cette statue monumentale. L’ « art déco » est l’art du modernisme. Tout d’abord on utilise les nouveaux matériaux, ici ce sera le béton. Puis « l’art déco » est l’art de la géométrie, de la symétrie, en rupture avec « l’art nouveau » qui est l’art des circonvolutions. La statue du Christ Roi est représentative de cette vision moderne.
Grâce aux drones on peut aujourd’hui mieux apprécier cette statue emblématique quelque fois moquée pour sa silhouette massive.
Son intérêt historique mérite qu’on l’apprécie.
Autres statues monumentales de Christ Roi :
Brésil à Rio : statue de 25m de haut sur un piédestal de 85m – 1931
Portugal à Almada Lisbonne : 28m de haut sur un portique de 82m – 1949-59
Suisse dans le Valais à Lens: statue de 15m su socle de 15m – 1935
Pologne à Świebodzin : statue de 33 m de haut – 2010
Sources : Gilbert Gardes Histoire monumentale des deux Savoies – Revue de l’illustration 1934- Yves Borrel document écrit pour la commune des Houches – Paul Guichonnet : Encyclopédie savoyarde
L’hôtel le plus charmant de notre vallée : l’Hôtel de la Prairie au village des Bois
Il
Il évoque une petite maison du bonheur, une exception dans cette vallée où profit jongle avec urbanisation. On est sous le charme de cet hôtel construit au cœur des champs face au Mon Blanc. On admire sa façade ancienne et traditionnelle, on aime sa tonnelle luxuriante et ses nappes à carreaux… Ici on ressent ce sentiment d’un passé suranné qu’évoque ce lieu hors du temps.
Ici, Henri Claret Tournier construit entre 1900 et 1905 un petit hôtel sur une jolie parcelle de terre appelée « les Carrés », dont il a hérité tandis que son frère recevait la ferme familiale proche.
Les habitants du village participent à la construction, les graniteurs de la carrière voisine réalisent tous les encadrements en granit des fenêtres et portes de l’hôtel. Henri avait compris que la poussière et l’agitation du centre de Chamonix pouvaient faire fuir des clients qui seraient alors à la recherche d’un lieu verdoyant et tranquille. Pari gagné. L’hôtel n’ouvrira que l’été, mais ne désemplira pas de saison en saison d’été. C’est bien chez Henri que les clients citadins viendront se reposer et profiter du calme absolu de ce village authentique. A l’arrière de la maison, selon la tradition, il y eut longtemps une écurie qui permettait ainsi de fournir la clientèle en lait frais. De même un potager jouxtait l’hôtel. Du bio avant l’heure… Henri était guide. Il sera guide chef en 1920, et aussi conseiller municipal pour la commune de Chamonix. Avec ses clients qui logeaient chez lui il parcourra la montagne, les emmenant partout dans le massif. Il ira entre autres 99 fois au sommet du Mont Blanc, le plus souvent avec eux. Belle performance! Henri avait pour épouse Aline, une Charlet venue d’Argentière. C’est elle qui tiendra l’hôtel lorsque son mari de guide partait en montagne. C’est elle qui saura recevoir cette clientèle citadine. L’hôtel ne désemplissait pas de tout l’été. La clientèle anglaise prenait plaisir à passer un mois ou deux ici au village des Bois, loin des fumées londoniennes.
Henri Claret Tournier et son épouse Aline, sa fille Perlina, et l’employée de maison.
Perlina, la fille adorée d’Henri , prendra la succession. D’une main de maître elle tiendra l’hôtel jusque dans les années 1950. C’est à cette époque que Jean Louis Barrault et Madeleine Renaud résideront à la chambre n°16 face au Mont Blanc, dans cette pension au cachet si rare .Ce petit hôtel se transforme doucement. Il était difficile pour les héritiers de moderniser un hôtel datant des années 1900. Cependant, contrairement à beaucoup d’autres hôtels de la vallée qui changeront de mains, il restera la propriété de la famille. En 1950 Jean et Louisette font de cet hôtel une pension de famille chaleureuse et appréciée de tous, connue entre autre pour son excellente cuisine .On gardera jusqu’en 1990 la veille tradition chamoniarde d’appeler les clients pour les repas à l’aide d’une cloche… C’est dire à quel point cet hôtel était apprécié à sa juste valeur pour l’authenticité de ses habitudes.
De nos jours il est tenu par l fille de Geneviève, arrière petite fille de Perlina. Elle entretient avec bonheur la tradition familiale, elle modernise peu à peu les lieux, leur conservant ce charme d’une autre époque.
On ne peut que souhaiter que cet hôtel à l’attrait si indéfinissable puisse rester encore longtemps au milieu des prés méritant son nom de « la Prairie ».
On lui souhait longue vie…
Sources : archives familiales famille Lochet – Claret Tournier